Contribution de la Guadeloupe à la Pensée Française

Page 312

264

CONTRIBUTION

DE LA GUADELOUPE

ments les moins avouables, le bénéficiaire est désigné sinon nommé. Ainsi, chaque fois que Louis XV fait prendre 500,000 francs pour Mme Dubarry (et cela arrive en moyenne six fois par an), le trésorier inscrit : « Remis au Roi » et, entre parenthèses («pour Mme la comtesse»). Les souverains étrangers, les princes allemands surtout, qui recevaient des subsides de la Cour de France, les agents de la police diplomatique particulière du roi figurent tous avec leurs noms sur le registre du payeur. Ne restent inexpliqués que quinze ou seize paiements de 150,000 à 200,000 francs, dont bénéficièrent les bâtards. Sachant quels embarras les enfants nés hors mariage avaient parfois causés à ses prédécesseurs, Louis XV ne voulait pas qu'il restât, même dans une comptabilité qui ne devait jamais être divulguée, pensait-il. trace de leur origine. On faisait élever les filles dans quelque couvent; on confiait les garçons à quelque vieil officier de Saint-Louis, et quand ces enfants avaient assez grandi on les expédiait aux « îles » sous un nom qui devenait le leur, mais qui n'avait aucun rapport avec celui de leur père. Voilà pourquoi, dans le monde créole, il arrive que l'on rencontre un homme au type bourbonien très accusé, aimable, galant et parfois un peu mélancolique. C'est un rejeton de notre ancienne maison royale, un cousin authentique, quoique de la main gauche, de feu M. le comte de Chambord. Si vous entrez dans son intimité, il ne vous sera pas difficile toujours de vous faire révéler le secret de son origine. L'un d'eux me disait un jour : « Ma grand'mère a fait un faux pas dans la chambre du roi. »

Ce petit monde de planteurs créoles, de ceux qu'on appelle les « Grands Blancs », par opposition aux « Petits Blancs » qui exerçaient les professions du com-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.