Contribution de la Guadeloupe à la Pensée Française

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LA

PENSÉE

FRANÇAISE

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l'embarquement des cinq mille habitants s'opère en bon ordre. Deux hommes restaient encore à terre, le maire et le curé, et ils luttaient avec une abnégation stoïque, à qui embarquerait le dernier. — Passez d'abord, M. le maire, disait le curé, M. Desprez. — Après vous ! répliquait le magistrat communal, M. Grelet. Ces deux cœurs vaillants, qui avaient rivalisé d'amour pour le prochain, rivalisaient de sublimité. L'adjoint de Morne-Rouge. Colat, et son secrétaire, municipal, M. Muratet, ayant vu partir la population, crurent de leur devoir de donner la sépulture aux cadavres tombés sur le sol de la commune. Sous la cendre, menacés par la lave, ils accomplirent leur lugubre besogne et ensevelirent eux-mêmes les restes des malheureuses victimes de la catastrophe. Du côté des marins et des militaires il n'y a que des éloges à décerner. Le Suchet et son commandant, le croiseur danois VaJkyrien, le Pouyer-Quertier ont, dès la première heure, coopéré au sauvetage des victimes et des populations, avec une résolution admirable. Combien auraient péri qui leur doivent la vie ! La garnison, dont les pertes en officiers et en hommes se comptent et qui a si malheureusement vu disparaître l'un de ses chefs, le colonel Gerbault. a fait son devoir avec vaillance. L'exemple, venant d'en haut, avait relevé les cœurs et excité les citoyens au renoncement d'eux-mêmes et au dévouement. A côté de la brutalité des forces aveugles de la nature apparaissait ainsi resplendissante la puissance morale de l'homme.


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