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N° 84. L'an mil huit cent quarante-cinq, et le trois du mois de juin, vers les trois heures de relevée, Nous, Joyaux (Auguste), et Gousse (Andevanne), tous deux gendarmes à la résidence du Gros-Morne, certifions qu'ayant appris par la voie de M. Belant, secrétaire de la Mairie, que la négresse Appoline, appartenant à M. Minhuit Camille, demeurant hauteur du Gros-Morne, s'est noyée dans la rivière Lézarde, près l'habitation de son maître, nous être transportés sur les lieux, assistés do
M. le maire.
Arrivés près d'un bassin de quinze pieds de
long, sur vingt pieds de large, nous vîmes le cadavre d'une négresse paraissant âgée de quinze ans environ, que l'on avait retire de la rivière et déposé sur l'un de ces bords. Examen fait du cadavre, aucune trace de vio-
lence ne se faisait remarquer sur son corps. Toutes les personnes présentes se sont accordées à dire, et notamment M. le maire, M. Minhuit Camille, son maître, et MM. Lanlemant et Louis, que cette jeune fille s'était donne la. mort volontairement. Nous demandâmes à M. Minhuit Camille à quoi il pouvait attribuer un pareil désespoir; il nous dit que celte négresse, dont le seul
travail
était de vendre du poisson, en avait vendu à crédit pour une somme de six francs, que sa maîtresse lui en lit des reproches, lui disant qu'elle la ferait châtier si elle ne recouvrait pas cet argent, et que vendredi dernier la négresse avait disparu. La croyant marronne, ils la firent chercher aux environs, et ce matin ils trouvèrent son cadavre dans le bassin ci-dessus mentionné. Vu que le cadavre était en putréfaction, M. le maire donna ordre de l'enterrer de suite, et, nous présents, il le fut sur la propriété de M. Minhuit Camille, son maître.