Comment on traite nos colonies : Candidature officielle et mœurs électorales

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— 73 — celui-ci procède à une enquête des plus sérieuses, suivie, s'il y a lieu, des plus sévères sanctions... » Et le 4 juillet 1910, à l'occasion de la discussion des rapports dont nous venons de donner quelques extraits, M. le député, Maurice Colin disait à la tribune de la Chambre : « On se permet souvent d'attaquer la représentation des colonies ; mais il s'agit de savoir si on peut la critiquer et l'attaquer à raison de ce que les habitants des colonies n'en seraient pas dignes, ou s'il ne serait pas plus juste et plus vrai de se demander si la France choisit assez bien ceux qu'elle envoie dans ses possessions pour parler en son nom. « Les autorités supérieures de la Réunion se sont permis à l'occasion des élections dernières... certains actes que le gouvernement ne peut pas tolérer, que la Chambre ne tolérera pas.

L'enquête proposée par le 11e bureau fut ordonnée par la Chambre. Elle fut confiée, pour les faits imputés aux fonctionnaires de l'ordre administratif, à M. le gouverneur Rodier ; pour les actes repréhensibles reprochés aux magistrats de l'ordre judiciaire, à M. le Procureur général Girard. Les rapports d'enquête sont aux archives de la Chambre. Ils établissent, d'une façon générale, l'exactitude et le bien-fondé de tous les griefs articulés contre les agissements arbitraires, illégaux, souvent criminels, des autorités supérieures de la Réunion. La Chambre avait demandé des sanctions contre les coupables. L'on verra quelles sont celles qui furent prises ! En fait, à part deux ou trois exceptions, l'on garda les mêmes... et l'on recommença... et l'on continue. C'est l'occasion de montrer dans toute sa cynique indécence la principale manœuvre électorale (?) utilisée par l'administration coloniale au service de la candidature officielle. L'on se rappelle que le 13 avril 1910, le gouverneur par intérim Jullien, pour enlever les urnes de Saint-Denis au candidat Le Cocq, alors maire de cette ville, avait arbitrairement dissous le conseil municipal et nommé une commission spéciale qui fut chargée de présider au scrutin du 24 avril suivant. Il ne s'agissait, ainsi que l'établi péremptoirement le rapport Rodier. que d'une manœuvre brutale préparatoire de la fraude électorale. L'acte abusif du gouverneur, déféré au Conseil d'Etat, fut annulé pour excès de pouvoir.* L'arrêt de la haute Assemblée ordonna la réinstallation de la municipalité Le Cocq. Cette leçon ne servit pas. Il fallait, « coûte que coûte», enlever les urnes de Saint-Denis au parti Le Cocq.


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