Origines de la Martinique : le Colonel François de Collart et la Martinique de son temps

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ET LA MARTINIQUE

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succinctement ce que nous savons déjà. Mais, le 25 mai, fut écrite, après le départ du Gédéon, une « seconde lettre des habitants au Roi, justificative de la conduite qu'ils venaient de tenir ». Ce document très développé, que nous a transmis Pierre Dessalles dans ses Annales du Conseil souverain de la Martinique, sur la minute restée aux archives de la colonie, contient dix-neuf pages d'impression in-quarto. On peut juger par cette étendue combien de détails sont renfermés dans ce factum, fort bien tourné d'ailleurs. Il fut composé hâtivement (la situation étant impérieuse) par d'Hauterive, l'homme vraiment lettré du Conseil martiniquais. La seconde lettre dont il s'agit, annoncée dans la première, a suivi celle-ci de très près. Dans cette pièce capitale les méfaits de La Varenne et de Ricoüart, pendant quatre mois, sont exposés au grand jour. On ne ménage rien à ces messieurs... Deux passages à noter sembleraient prouver qu'ils ne gardaient guère de convenance en quoi que ce soit. Et d'abord : « la Noblesse, les officiers et les principaux du pays se sont vus méprisés et tutoyés, soit de bouche, soit par écrit... » On trouve en second lieu que La Varenne et Ricoüart s'étaient aussi aliéné les dames de la colonie, chose grave! Ne s'expliquant pas le laisser-aller créole et l'extrême simplicité du vêtement léger féminin qu'exige la chaleur du climat, ils usaient communément devant témoins, au sujet des femmes, d'une expression que l'on peut à peine laisser deviner. Voici la phrase caractéristique extraite de la seconde lettre martiniquaise : « Le sexe n'a pas plus éprouvé d'égards, puisqu'il est notoire qu'il a été qualifié par ces messieurs d'une épithète également injurieuse et obscène, qu'on n'ose répéter à Votre Majesté, et cela sans distinction d'âge, d'état ni de condition. » D'Hauterive est impitoyable. Tout ce qu'il expose (du moins il le déclare) est appuyé de plusieurs déclarations particulières, faites sous la foi du serment. A-t-on ajouté créance, au Palais-Royal, à ces allégations habilement présentées ? On doit le supposer d'après ce qui


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