Belain d'Esnambuc et les Normands aux Antille

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—37— à son tour sa vie chèrement aux ennemis. —Il attaque le capitaine italien

qui les commande, lui passe son épée au travers

du corps, mais il ne peut suffire à parer les coups, et tombe enfin épuisé, son sang coulant par dix-huit blessures, dont la dernière fut d'un coup de pertuisane dans le flanc. Ici commence pour moi la partie du récit de Dutertre que je ne puis m'expliquer. Du Roissey, dans cette triste conjoncture, voyant cette mort, voyant les Anglais en fuite, — la compagnie de Du Parquet presque toute détruite avec son chef, perdit la tète. — Il abandonna son fort, fit mettre le feu aux poudres et se réfugia par terre dans le fort de la Cabesterre, où était d'Esnambuc, qui, en le voyant arriver sans son neveu, promit, lui, de tenir bon, si affligé qu'il fût. Mais, selon ce que dit Dutertre, il semble que Du Roissey ne voulut rien entendre, croyant toujours voir les Espagnols derrière lui, — et que par cette terreur qui le dominait, et qu'il faisait

partager à trop de

gens,

il

acheva de perdre le poste de d'Esnambuc, comme il avait perdu le sien.

Je conçois peu le rôle qu'on fait jouer à un homme

qu'estimait le commandeur de Razilly, et que d'Esnambuc avait pu apprécier pendant plus de quinze ans qu'ils avaient couru la mer ensemble. — La relation à laquelle le père Dutertre a ajouté foi me semble à moi suspecte ou du moins insuffisante. Quoi qu'il en soit, faute d'autres documents, continuons de dire que, sur la demande de Du Roissey, un conseil de guerre fut assemblé et que la peur y prévalut. Il fut donc résolu de gagner Antigoa et de se défaire de d'Esnambuc, s'il persistait à demeurer et à défendre l'ile. Suivant le père Dutertre, d'Esnambuc, désolé, céda aux larmes et aux prières de ses amis qui craignaient quelque tragédie; il n'y avait déjà que trop de malheurs. Alors le capitaine


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