Le Père Antoine Lavalette à la Martinique, d'après beaucoup de documents inédits

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— 20 — « Jusqu'à l'année 1704, nous avons eu des missionnaires dans l'île Saint-Vincent, place où se sont retirés le reste des Caraïbes qui occupaient nos îles. On leur a accordé cette île, où ils vivent en repos et en liberté. Durant plus de trente ans qu'on a travaillé à les instruire, en vivant avec eux et presque comme eux, à peine en a-t-on pu convertir trente ou quarante, et il se trouve que, durant ce temps, on a baptisé plus de vingt mille noirs esclaves. La raison de cette différence vient de ce que les Caraïbes étant libres, se trouvant dans une île où il n'y a aucun exercice de religion, n'étant sollicités que par nous, ne craignant et n'espérant rien de nous, ne pouvant se résoudre à (pùtter leur manière de vivre, ils ne sont nullement touchés de nos raisons, de nos menaces. Il arrive de là que tout ce qu'ils voient et entendent, les éloigne de notre religion, tout, d'autre part, les engageant à rester comme ils sont. Ou ils ne nous écoutent pas, ou, s'ils nous écoutent, c'est sans dessein de se convertir ; ou, s'ils sont tant soit peu touchés, l'indolence qui leur est naturelle, le respect humain qui est leur défaut , et la peine qu'ils ont à se faire violence, les empêcheraienf de se convertir ; ou, quand ils auraient assez de courage et de raison pour vouloir être chrétiens, on aurait peine à leur donner le baptême, à moins qu'on ne fût assuré qu'ils quitteraient leur terre pour vivre parmi les Français, ce qu'on ne peut presque obtenir d'eux. Leur conversion étant par tous ces obstaeles presque impossible, on a jugé à propos de les abandonner 1. 1. Dans les Missions catholiques françaises au XIX* siècle, t. VI, pp. 337 et sniv., on lit : « Des Caraïbes, ces anciens possesseurs des Antilles, il ne reste presque plus rien, si ce n'est quelques épaves réfugiés à la Dominique où ils peuvent être 150 environ, en ne comptant que ceux de race pure Ils sont silencieux et travaillent facilement sans rien dire. Ils cultivent les jardins pour avoir les provisions accoutumées du pays, c'est-à-dire le manioc, les


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