Nouvelles des missions extraites des lettres édifiantes et curieuses : missions de l'Amérique

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( 184 ) hommes d'un côté et les femmes de l'autre ; je pratiquai aussi un lieu séparé pour celles qui étoient enceintes, et on m'avertissoit aussitôt que quelque enfant venoit au m o n d e , afin de le baptiser sur-le-champ. Mon premier soin étoit d'abord d'administrer les sacremens à chaque malade, et de le disposer à une sainte mort, Ensuite je leur donnois les remèdes que je croyois les plus propres à les guérir, et qui effectivement en ont tiré plusieurs des portes de la mort. J'appris à quelques Indiens la manière dont ils devoient s'y prendre pour saigner. Le premier couteau, ou quelque autre outil semblable, qui leur tomboit sous la main, leur servoit de lancette, et en peu de temps ils ouvrirent la veine à plus de mille personnes. Je parcourois plusieurs fois le jour chaque hamac, soit pour porter des bouillons aux malades, soit pour leur faire boire de l'eau de limon, afin de rafraîchir leurs entrailles. Comme la malignité do la contagion se jetoit presque toujours sur leurs yeux ou sur leurs oreilles, en sorte qu'ils étoient en danger de demeurer sourds ou aveugles le reste de leur vie, je faisois une autre tournée, suivi d'un Indien, qui leur ouvroit les yeux, tandis qu'à la faveur d'un long tuyau, j'y soufflois du sucre candi en poudre, ou bien je leur mettois dans l'oreille des petites boules de coton imbibées de vinaigre. Telles furent pondant près de trois mois mes occupations de chaque jour, qui me laissoient à peine le temps de prendre un morceau à la hâte, et de réciter mon office. Je me croyois à la fin de toutes mes fatigues, et je commençois à respirer, lorsque je me


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