Tricentenaire des Antilles : Guadeloupe 1635-1935

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disaient, mais en secret, que c’étaient des Caraïbes qui leur inspiraient encore de la crainte, quoiqu’ils fussent en notre pouvoir; ce qui prouvait qu’elles appartenaient à une nation subjuguée. Nous connûmes ainsi celles qui étaient Caraïbes et celles qui ne l’étaient pas (de las mugeres) parce qu’elles (les Caraïbes) portaient à chaque jambe deux anneaux tissés de coton, l’un à côté du genou, l’autre près de la cheville ; et comme ils étaient très serrés, cela leur formait de très gros mollets, ce qui me fait penser que parmi eux c’était une beauté; et cette différence vous les faisait distinguer les unes des autres. Les mœurs de ces Caraïbes sont très brutales... Il règne parmi les habitants de ces îles une telle ressemblance qu’on dirait qu’elles appartiennent à la même famille. Ils ne se font jamais de mal entre eux, mais ils font, d’un commun accord, la guerre à toutes les autres îles voisines ; et, s’embarquant dans de grands canots qui sont de petites flûtes d’une seule pièce de bois, ils vont porter le ravage à cent cinquante lieues de leur pays. Leurs armes sont des dards mais non en fer, car ils ne possèdent pas ce métal ; aussi, les uns se servent-ils à la place de pointes, d’écaille de tortue ; d’autres, des arêtes fort dures d’un poisson, qui sont naturellement et fortement dentelées comme une scie. Ces armes, contre des personnes désarmées, tels que sont les adversaires qu’ils vont attaquer, peuvent tuer ou faire beaucoup de mal ; mais contre des hommes comme nous, ce ne sont pas des armes fort dangereuses. Ces gens vont faire le brigandage dans les autres îles et emmènent avec eux toutes les femmes qu’ils peuvent surprendre, surtout celles qui sont jeunes et belles. Ils les emploient pour leur service et les considèrent comme leurs maîtresses. Ils en enlèvent une si grande quantité que, dans cinquante cabanes où ils ne parurent pas, nous trouvâmes plus de vingt femmes captives qui nous suivirent. Ces femmes nous parlèrent de leur cruauté et nous en racontèrent des traits qui paraissent incroyables. Elles nous dirent qu’ils mangent les enfants qu’ils ont des captives et qu’ils élèvent seulement ceux que leur donnent les femmes de leur île. Ils emmènent chez eux, pour les conserver comme provision de boucherie, les hommes des autres pays qu’ils peuvent saisir vivants.


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