Tricentenaire des Antilles : Guadeloupe 1635-1935

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— 4 — découvrir aucun le long de la côte que nous venions de parcourir. Autant qu’on pouvait juger de cette île parce qu’on en voyait, ce n’était qu’une vaste montagne, très belle, très verdoyante; il n’y avait pas jusqu’à l’eau qui nous faisait plaisir à voir, parce que dans notre pays, il y a à peine quelque chose de vert à cette époque. Voyant que nous ne trouvions pas de port dans cette île, l’Amiral ordonna de se diriger sur l’autre île placée à main droite et qui était éloignée de la première d’environ 4 à 5 lieues. Alors un vaisseau resta tout le jour autour de cette première île pour y chercher un port, en cas qu’il fut nécessaire d’y venir. Il y en trouva un bon et sûr et vit des maisons et des habitants. Aussitôt après, il s’en retourna cette nuit vers la flotte qui avait mouillé dans l’autre île (1) sur laquelle l’Amiral, suivi d’une grande partie de son équipage, descendit, la bannière royale en main, et dont il prit possession au nom de leurs Altesses dans la forme du droit. Il y avait dans cette île des futaies d’une si grande épaisseur que c’était merveille et une si grande diversité d’arbres inconnus à nous tous que c’était étonnant, les uns avec leurs fruits, les autres en fleurs, de manière que tout était vert. Ici, nous trouvâmes un arbre dont la feuille avait une odeur de clous de girofle, la plus suave que j’aie jamais sentie. C’était comme un laurier, mais il n’était pas si grand et je pense que c’était toujours de l’espèce du laurier. Il y avait là des fruits sauvages de différentes espèces dont quelques Espagnols eurent l’imprudence de goûter; et, par ce seul fait, et pour les avoir touchés seulement avec leur langue, leurs figures s’enflaient et il leur venait une si grande inflammation, accompagnée de douleurs si aiguës, qu’ils paraissaient être en rage (2), on les soulageait avec des choses froides. Nous ne trouvâmes personne dans cette île, ni aucune trace d’homme et nous crûmes qu’elle n’était pas peuplée. Nous y restâmes bien deux heures, parce que quand nous y arrivâmes, il se faisait déjà tard, et que nous partîmes le lendemain matin pour une autre île (3) qui paraissait plus basse que celle-ci, était fort grande et en était éloignée de sept à huit lieues. Nous y arrivâmes du côté d’une grande montagne (1) Marie Galante. (2) On a conclu de là que c’était le fruit du Mancenilier. (3) La Guadeloupe.


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