Les grands aventuriers à travers le monde : les robinsons de la Guyane. Partie 1

Page 67

L E S R O B I N S O N S DE LA GUYANE

63

domicile. Qui sait si d'un moment à l'autre quelqu'un de ses anciens compagnons, ou même un surveillant, ne déboucherait pas inopinément dans la clairière? La vigueur lui était revenue, et, avec la force, un irrésistible besoin de conserver à tout prix celte liberté conquise après de si terribles souffrances. Un mois s'était écoulé déjà depuis le jour où ses ennemis avaient été si rapidement mis en déroute par le corps d'armée de reptiles, dont Casimir était le commandant en chef. Il s'était bien vite habitué à cette vie tranquille, dont le calme profond reposait son âme et son corps de l'enfer du bagne. Mais aussi la pensée des siens ne quittait plus son cerveau. Chaque jour, chaque heure était remplie du doux et triste souvenir des absents. Chaque nuit, son sommeil était hanté par ce cher et douloureux cauchemar. Comment les prévenir que l'heure de la délivrance avait sonné ? Comment les revoir? Comment leur donner un simple signe d'existence, sans s'exposer au plus cruel danger? Les idées les plus folles, les projets les plus irréalisables se présentaient à son esprit. Tantôt il voulait gagner la rive hollandaise, traverser la possession tout entière et arriver à Demerara, capitale de la Guyane anglaise. Là, il pourrait trouver de l'ouvrage pour subvenir à ses premiers besoins, puis prendre passage à bord d'un navire en partance pour l'Europe, et sur lequel il s'embarquerait comme matelot. Mais les raisonnements de Casimir avaient bientôt réduit à néant ce chimérique projet. Il serait indubitablement arrêté par les Hollandais, et dans le cas contraire il n'avait aucune chance de gagner la colonie anglaise, avec laquelle la France n'a pas de traité d'extradition. — Si d'autre part je remontais le Maroni, je suis sûr, d'après les cartes de Le Blond, que sa branche principale, YAoua, l'Amazone.

correspond avec le bassin de

Ne pourrais-je descendre le Yarry, ou tel autre affluent jusqu'au

Brésil ? — Ou pas prouvé caba (déjà), compé, répétait le noir. Ou qu'attendez morceau. (Attendez un peu). — Oui, mon bon Casimir, j'attendrai... le plus longtemps'possible. Nous ferons des provisions, un canot, puis nous partirons tous deux. — Ça même. Ce fut seulement après de longs débats que Robin consentit à associer le* vieillard aux hasards de son entreprise. Non pas qu'il craignit outre mesure son contact et la contagion pou trant en résulter ; loin de là. Mais Casimir


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.