Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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blant ses forces, i l se met à e n t o n n e r devant le tribunal les couplets républicains du Réveil d'Epiménide, sur Pair desquels il avait a c c o m m o d é ceux qu'il avait chantés contre la C o n v e n t i o n au dîner de Pascal. « — C'est bien l à ce que vous avez e n t e n d u », demande-t-il à H i r c h t m a n n . » — « O u i », répond celui-ci qui reconnaît l'air sans c o m p r e n d r e les paroles. — « Vous le voyez, citoyens! », conclut t r i o m p h a l e m e n t Ange P i t o u . L'impression fut considérable ; alors l'avocat s'efforce d'attendrir les juges et s u r t o u t l'auditoire visiblement s y m p a t h i q u e , en M o n t r a n t l'état déplorable où la prison a mis son client. — « Q u ' o n aille chercher la femme Morlay, rue de l ' H i r o n d e l l e ! » déclare le président. Le subterfuge était découvert, et c'en était fait du pauvre P i t o u sans l'intelligente initiative du luge Maire, qui avait changé au rôle l'adresse de l'accusatrice.— * Très bien, citoyen président, répond l'huissier, je la c o n n a i s , c est une blanchisseuse de mes voisines. » Et, quelques m i n u t e s après, on introduisait devant le t r i b u nal une pauvre femme, m o r t e de peur et persuadée que sa d e r niere heure venait de sonner. — « Citoyenne Morlay, connais-tu Ces h o m m e s ?» — « N o n , citoyen président. » — « T u peux te 1 e t i r e r . » La d a m e ne se le fait pas dire deux fois ; mais l'accusateur Public flaire une méprise et s'apprête à requérir un s u p p l é m e n t d'enquête. « Les jurés sont suffisamment i n s t r u i t s ; q u ' o n ferme les débats! » déclare Vilate, qui sans doute commençait à avoir l'estomac dans les talons. Il était, en effet, deux h e u r e s ; dix M i n u t e s après, le verdict était r e n d u : Pascal, D u r a n d , P a u l i n condamnés à m o r t ; P i t o u , P e y e n , W e t t e r a c q u i t t é s ; à ceux-ci Dobsent adresse u n e belle semonce patriotique, après quoi ils sont mis en liberté. Ange P i t o u avait particulièrement intéressé le public. S u r son Passage la foule jeta des fleurs et des poignées d'assignats au M a l h e u r e u x que soutenait un g e n d a r m e ; son b o n h e u r lui avait c O i i c i l i é l'amitié de ceux qui quelques instants a u p a r a v a n t l ' a u r a i e n t sans'scrupules envoyé à la guillotine, et, à sa sortie, les jurées, dont cinq cependant avaient voté sa m o r t , l ' e m m e n è r e n t Pitoucr au r e s t a u r a n t voisin. D u r a n t ce repas, le c œ u r d'Ange det;ou était partagé entre la joie d'avoir la vie sauve et la d o u l e u r Q}injuste c o n d a m n a t i o n de son ami P a s c a l ; à la fin le greffier, Qui & était de la fête, se lève p o u r aller, dit-il, « expédier son 3 : », c'est-à-dire signifier leur jugement aux c o n d a m n é s ; il ^ vcrse une rasade d'eau-de-vie et o f f r e au libéré de t r i n q u e r à la 'Publique. « La R é p u b l i q u e , s'écrie Pitou en brisant son

verre,


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