Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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naturellement, les médecins du théâtre ne sont pas à leur service ; on réveille ceux du quartier, et les premiers soins sont d o n n é s par l'ouvreuse de la loge. U n jeune docteur, qui habite en face l'Opéra, accourt le premier, à demi habillé : puis viennent les docteurs L a c r o i x - L a c o m b e et Blancheton, ce dernier h a b i t a n t la m ê m e maison q u ' A n g e P i t o u . O n veut débrider et élargir la plaie; le d u c alors est m o n t é dans sa loge et placé sur u n canapé, mais la position est défectueuse et gênante : ce que voyant, le docteur L a c r o i x - L a c o m b e sort avec les valets de pied, va réveiller son voisin, u n tapissier n o m m é Duriez, logé, 6, r u e R a m e a u , et lui emporte à la hâte u n lit de sangle, deux draps, deux matelas, u n traversin, q u i , disposés avec un troisième matelas fourni par le docteur B l a n c h e t o n , forment u n lit sur lequel o n étend le m a l h e u r e u x d u c de Berry. Quelques instants après, le secrétaire général de l'Opéra, G r a n d sire, faisait descendre de son a p p a r t e m e n t u n e couche et ses accessoires; mais, c o m m e il n'en était plus besoin, on remisa le tout dans le cabinet au bois, attenant à la loge où agonisait le prince. Les médecins fameux mandés n ' a p p o r t e n t pas le s o u l a g e m e n t espéré, et la m o r t est le terme fatal de cet attentat. Le d u c de Berry manifeste le désir de voir le r o i ; en attendant, il se c o n fesse p u b l i q u e m e n t à l'évêque de C h a r t r e s : à trois h e u r e s d u matin, arrive l'abbé M a r d u e l , curé de S a i n t - R o c h , q u ' o n est allé chercher p o u r administrer les derniers sacrements. Le pasteur arrive : le père, le frère, l'épouse, l'auguste c o u s i n e du Prince, les h o m m e s de tous les rangs, s'agenouillent ; le Martyr est à moitié sur son séant, le prêtre et quelques assistants qui lui aident sont debout et prient... T o u t autour du lit est l'arsenal de la mort : la porte de la salle, les meubles, le parquet, le linge dans le Plus grand désordre sont marqués du sang de la victime. L e s instruments de chirurgie sont jetés pêle-mêle avec les potions et les vases de p h a r m a c i e . . . Le Prince seul, au milieu de tant d'alarmes, malgré les tortures et l'horrible tremblement de tous ses m e m b r e s , conserve une sérénité angélique... Il demande sa fille, la bénit ainsi que s o n épouse qui la lui présente. Se soulevant un p e u , il leur impose les mains et dit : « Hélas 1 chère enfant, puisses-tu être moins m a l h e u reuse que ta famille! » Le souvenir des deux jeunes enfants qui vont être orphelines se Présente au Martyr; il demande à son épouse la permission de les voir : cette demande était accordée d'avance par la confession publique du Prince. A l'instant, ces deux jolies personnes, vêtues de blanc, sont introduites et se jettent à g e n o u x auprès du Prince qui ne peut ((

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