Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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ANGE

PITOU

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Barbé-Marbois, La Villeurnoy, J . - J . A y m é , F r e y t a g ont porté sur ce p e r s o n n a g e des jugements c o n t r a d i c t o i r e s ; le portrait, qu'en a tracé Ange P i t o u , semble le plus ressemblant et le mieux observé : Son abord est prévenant, la gaieté siège plus sur son front que la franchise, ses manières sont aisées, il débite avec une égale effusion tout ce qu'il pense c o m m e tout ce qu'il ne pense pas ; son grand plaisir est d'être impénétrable en paroissant ouvert, il se pendrait si on pouvait lire dans son c œ u r , et je ne sais pas s'il en connaît l u i - m ê m e tous les replis. Il fait autant de bien que de mal, et toujours avec la même indifférence. Il met chacun à s o n aise, il pardonne de dures vérités et m ê m e des injures ; il manie le sarcasme et la répartie avec

ture des terres, des forces suffisantes leur furent adjointes, et l'expédition fut placée sous la direction de Le Fèvrc de la Barre, le gouverneur choisi de la Guyane. Le succès, cette fois, fut très vif, et, en quelques années, la colonie se trouva en pleine prospérité; mais des contrariétés diverses survinrent, et au cours de la guerre de dévolution, Cayenne fut pris et saccagé par les Anglais ; quelques mois après, les Français reprenaient la colonie ; en 1762, au cours de la guerre de Hollande, elle retombait à nouveau au pouvoir des Hollandais, pour être reconquise par la France, quelques mois plus tard, et définitivement cette fois. L'organisation de la Guyane avait toujours été défectueuse, voire nulle, et l'état des colons s'en ressentait particulièrement. Pour remédier à cette situation autant qu'au fâcheux état des finances françaises, le ministère Choiscul, en 1763, tenta une vaste opération sur Cayenne; l'indication de mines d'or en ces sols vierges ouvrait un large champ à la cupidité : on attribua à cette colonie un crédit de quelques milliers de francs, sur lequel devaient être prélevés les frais de culture du sol guyanais par ceux qui voudraient en acquérir des parcelles, en échange de leurs propriétés de France ou d'une somme remboursable à Cayenne. Pour réaliser ce projet on leva 3,ooo à 4,000 hommes en Alsace, et bientôt 15,000 naïfs se trouvèrent Pour aller chercher une problématique fortune dans ces terres lointaines. Le chevalier de Turgot fut nommé gouverneur du pays, et le territoire de Kourou choisi comme théâtre de cette entreprise. On avait tout prévu pour faire de Kourou une cité prospère et élégante, habitée par de belles dames et d'aimables cavaliers; on avait songé à tous les besoins divers d'une cité, '°n s'était même précautionné d'un lot appréciable de filles de joie...... on n'avait négligé qu'un détail, faire construire des maisons! Aussi les émigrants furent-ils contraints de se loger trois ou quatre cents ensemble dans les karbets; la peste arriva, les fièvres du pays frappèrent ces malheureux : la naortalité fut telle que, soir et matin, un tombereau, précédé d'une sonnette, Passait dans le village avec quatre chargeurs, qui criaient : « Mettez vos niorts à la porte! » La disette était à l'avenant; un cambusicr de vaisseau s'avisa de faire la chasse aux rats, il les vendait 20 sous pièce et gagna 2o,ooo livres. Bref, sur i5,66o émigrants, au 3i décembre 1764, il e" avait Péri 13,o6o! deux mille purent se réembarquer, le reste demeura en Guyanc.


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