Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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PITOU

à la date du 26 nivôse —et les chantailleurs des rues recommencent à glapir de plus belle des chansons qui tendent toujours à l'avilissement des autorités constituées et du gouvernement . 1

Ange P i t o u était tout particulièrement observé : J'ai été en surveillance dans differens cafés, billards, salles de vente, groupes, etc., — rapporte à cette date un des agents de la police de l'Etat-Major — je ni ai rien entendu dire contre le gouvernement, excepté un de ces derniers, qui se tient tous les jours depuis quelque temps près du puits qui fait face à la rue des Prêtres, ci-devant SaintGermain-l'Auxerrois, place du dit. Un certain moine ci-devant oratorien à l'institution du dit ordre compose des chansons qu'il chante et débite à cette place, elles sont faites avec esprit et finesse, il les chante de manière qu'elles ne tournent pas toujours au profit de la République et du gouvernement ; il place des mots entre ses couplets qui pourraient bien tendre à égarer l'esprit public contre le régime républicain, car les ennemis du gouvernement se tournent de tout sens pour grossir leur parti, afin d'en tirer avantage aux assemblées primaires, du moins je crois le voir ainsi, il peut se faire que je me trompe ; mais ce qu'il y a de sure c'est que notre chanteur a toujours un auditoire très nombreux et qui fait des réflexions à l'appui de ces couplets qui ne tournent pas au profit du gouvernement, lesquels Pourroient peut-être devenir incendiaires et dangereuses par les propos qui s'y tiennent : au reste il seroit bon de le faire surveiller de près par d'autres que moi qui développeraient mieux ses intentions . 2

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La mission chantante d'Ange P i t o u se compliquait toujours d'une action politique : si le soir il prêchait p u b l i q u e m e n t la royauté sur les places publiques, dans la journée il travaillait avec les commissaires royaux à en hâter directement le retour. Après la tentative avortée du i 3 vendémiaire, L o u i s X V I I I , sur l e s . a v i s de P i c h e g r u , avait réorganisé l'agence royaliste de l'intérieur et créé trois subdivisions : l'une c o m p r e n a n t la F r a n c h e - C o m t é , le L y o n n a i s , le Forez et l'Auvergne, u n e autre les Provinces m é r i d i o n a l e s ; le reste de la F r a n c e enfin dépendait de la section de P a r i s , placée sous la direction de l'abbé Brothicr, de Duverne de Presle et de Berthelot de la Villeurnoy *. 1

1. Archives Nationales. F 3828. 2. On voit par là que les erreurs des notes de police ne sont pas nouvelles, et que le crédit est mince qu'il faut, en général, leur accorder pour tout ce que leurs rédacteurs n'ont point vu personnellement. 3. Archives Nationales. F 3688 — 1 1 . 4. « Dans les derniers mois de 1796, M. Bargeton-La-Tour-Dupin, les deux Pelletier, Dunan, Brothicr, de la Villeurnoy eurent plusieurs confé1


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