Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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PITOU

patente de m a r c h a n d de c h a n s o n s ; il lui fut r é p o n d u que ce n'était pas là un état sujet à p a t e n t e ; il insista, on délibéra et, c o m m e il s'agissait d'argent à percevoir, les m a r c h a n d s de chansons furent compris dans la classe des m a r c h a n d s ambulants. Il put alors exercer légalement sa profession chantante et, en octobre 1 7 9 6 , il chantait « les Patentes » ; ces couplets, au reste très spirituels, devaient, un an plus tard, le faire déporter, car lorsqu'il les chantait, « il ne cessait, lit-on dans le jugement q le c o n d a m n e , de mettre la main à son derrière en parlant de № République et des républicains » ; c'était là u n de ces « gestes indécens et contre-révolutionnaires » que la loi du 27 g e r m i n ^ punissait de m o r t . Cette farce, d'ailleurs, amusait la galerie, & Ange Pitou par la suite la répéta souvent ; mais il est acquis qu'il en trouva l'occasion, en vendémiaire de l'an V , d a n s cette chanson des « Patentes », qui débutait et se poursuivait ainsi : n l

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Républicains, aristocrates, Terroristes, buveurs de sang, Vous serez parfaits démocrates, Si vous nous comptez votre argent. Et comme la crise est urgente, Il faut vous conformer au temps, Et prendre tous une patente Pour devenir d'honnêtes gens... Sous ce déguisement cynique, Remets-tu ce fameux voleur ? Fournisseur de la République, Autrefois simple décrotteur. Depuis qu'on parle de patentes, Monsieur dit qu'il n'a plus d'états, Que la République indulgente Le classe parmi les forçats... En fredonnant un air gothique, Arrive un chanteur écloppé, Si pour chanter la République Il faut que je sois patenté, Je ferai, dit-il, sans contrainte, Cette offrande à la liberté, Si désormais je puis sans crainte Chanter partout la vérité.

Parfois m ê m e il a b a n d o n n a i t le terrain politique et raillait l

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1. Ange Pitou, il est vrai, déclara bien qu'il ne mettait la main qu'à sa poche et pour chercher sa tabatière ; mais cette explication, bonne devar» un tribunal, laisse l'historien parfaitement incrédule.

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