Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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ANGE

PITOU

partie de cet ouvrage, il racontait, avec impartialité et en sérieux historien, les événements de vendémiaire ; dans u n e seconde, il établissait les torts réciproques des partis et plaçait la cause de tout le mal dans le discrédit croissant des assignats. Si nous avons plus de bien que de dettes, notre papier-monnaie ne peut et ne doit rien perdre chez les puissances, avec qui nous avons fait la p a i x ; car, suivant nos traités, nous restons propriétaires, de l'aveu de nos alliés, des biens du clergé et des émigrés. Ces puissances alliées, connaissant nos p o s s e s s i o n s , ne peuvent donc pas discréditer notre m o n n a i e ; cependant l'assignat n'a pas plus de valeur à Berlin qu'à Paris. Cette méfiance est la source de l'agiotage et Tannonce de la banqueroute; n o u s n'avions, jadis qu'une certaine quantité de métal, dont la valeur ne diminuait pas du jour au lendemain de 400 pour 100. Aujourd'hui, l'assignat baisse dans cette proport i o n ; nous en centuplons la quantité pour la réduire à sa primitive valeur; nous quadruplons donc la dette sans quadrupler notre fortune; que conclure de ce procédé? que nous faisons chaque jour une banqueroute partielle, voilà le mal que personne n'ose publier.

C'était mettre le doigt sur la p l a i e ; placer la question sur ce terrain était une m a n œ u v r e des plus habiles, capable d'atténuer l'effet de la défaite du parti royaliste, car le mal d é n o n c é était indéniable : le signaler, c'était en exaspérer l'acuité et suggérer au populaire des pensées, qui ne devaient pas être à l'avantage de la R é v o l u t i o n . Il faut croire que les royalistes c o m p r i r e n t le parti qu'ils pouvaient tirer de cette b r o c h u r e , car ils lui firent u n e réclame considérable ; dans son n u m é r o du 4 b r u m a i r e an IV, Y Ami du Peuple déclare que « cet ouvrage, affiché d a n s tout P a r i s , circule déjà dans les d é p a r t e m e n t s et que tous les honnêtes gens (lisez : les réactionnaires) l'envoient à profusion à tous leurs bonsamis ». De son côté, Ange P i t o u , qui avait toujours sa place de rédacteur à Y Ami du peuple de Lebois, p o u r solliciter plus vivement l'attention sur son livre, se mit à l'attaquer v i g o u r e u s e m e n t d a n s le journal jacobin ; le témoignage de Babœuf sur ce point est très ailirmatif, et on peut avoir l'assurance que tous les articles, parus d a n s les n u m é r o s des 2 , 4 , 6 et 7 b r u m a i r e sous ce titre : « Le t h e r m o m è t r e de la Révolution sur la journée du i 3 v e n d é m i a i r e » , sont de la main de l'écrivain royaliste. Ce sont là, en effet, de savantes attaques, des articles évidemment écrits dans un but opposé à la ligne politique du journal ; l'auteur


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