Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

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d'embarras ses camarades c o m p r o m i s ; il savait c o m m e n t agir sur la police et m ê m e sur la justice, bon n o m b r e de royalistes, et n o t a m m e n t les demoiselles More de P r é m i l o n , eurent m ê m e à se féliciter de ses connaissances à ce sujet Loin de se laisser abattre par les événenemts, il en reçut, au contraire, c o m m e un coup de fouet : il était de ces t e m p é r a m e n t s que l'adversité actionne et stimule, et qui d o n n e n t leur mesure dans la lutte et les revers. Au lendemain de vendémiaire, jugeant que les causes du m é c o n t e n t e m e n t populaire subsistaient toujours, il résolut de travailler l'esprit public, d'exaspérer les ressentiments populaires, et de poser à nouveau la question sur un terrain plus favorable. A cet effet, il usa du livre et de la chanson. D a n s les derniers jours de vendémiaire, il publiait une b r o c h u r e intitulée : Les torts de la Convention envers le peuple. — Les torts du peuple envers la Convention, ou les causes et les horreurs de la guerre civile à Paris, le i3 vendémiaire an IV de la République. ...Quand je serois royaliste comme quelques idiots ne manqueront pas de le dire, en lisant cet écrit — déclare-t-il — voilà le plan de conduite dont je n'ai jamais dévié : Me soumettre à la volonté générale qui établit le gouvernement, tout vicieux qu'il peut être, mais qui devient pourtant le gouvernement de tous, du moment qu'il est établi soit par la justice,soit parla force; consacrer à ce gouvernement, quiest la patrie de tous, mes facultés morales et physiques, mes biens, mon sang, ma fortune, voilà ma profession de foi et ma conduite... avoir le droit d'approuver ou d'improuver en moi-même la loi à laquelle je me soumets, voilà la liberté que tous les tyrans du monde ne m'arracheront qu'avec la vie. Sous le couvert de ces déclarations, il fit u n e œ u v r e de propagande royaliste d'une habileté c o n s o m m é e : dans une première 1 Les demoiselles More de Prémilon, qui servaient de secrétaires aux agents du roi, avaient transcrit les plans demandés par Louis XVIII et Charles X à l'agence de Paris : elles furent arrêtées pour cela et l'une d'elles subit soixante-douze jours de secret. Elles sortirent de prison, grâce aux assignats d'Ange Pitou ; elles lui ont rendu en 1824 l'important témoignage que voici : « Les avances que M. Pitou a faites pour sauver les agents du Roi sont réelles, considérables... P o u r notre compte, nous lui devons deux fois la vie et la liberté, et ce n'est jamais de sa bouche que nous avons appris Ce que M . Pitou a fait pour les royalistes compromis. Dans la mémorable affaire Geslin, dont le ministère du roi connaît tous les détails, il a fallu, nous dit un des membres du tribunal, le courage, l'adresse et les moyens de l'un de vos camarades pour vous tirer d'un si mauvais pas » (cf. Diverses pièces concernant les réclamations du sieur Louis Ange Pitou).

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