Ange Pitou Agent royaliste et chanteur des rues (1767-1846)

Page 130

106

ANGE

PITOU

1

de P r e m i l o n . Cette agence, qui était en relations suivies avec Vérone, Bàle et L o n d r e s , reçut, au c o m m e n c e m e n t de 1 7 9 5 , l'ordre du prétendant d'ouvrir des c o m m u n i c a t i o n s avec le parti a r m é dans les provinces de l'Ouest et n o t a m m e n t avec Charette ; Pierre Molette fut mêlé directement à ces négociations. U n revirement considérable contre la Révolution se produisit, en effet, et s'accentua en 1 7 9 5 , a u g m e n t a n t de jour en jour les chances d'une restauration m o n a r c h i q u e . Les princes avaient enfin c o m p r i s le caractère odieux d'une intervention étrangère ; des pourparlers avaient été entamés avec P i c h e g r u , et alors un plan très habile fut arrêté, qui devait, d'après l'ordre logique des choses, aboutir au retour de la m o n a r c h i e directement et par les a r m e s françaises. Les pouvoirs de la C o n v e n t i o n arrivaient à échéance, et tout présageait que les élections amèneraient u n e majorité, sinon de royalistes avérés, tout au m o i n s de constitutionnels, assez disposés par n a t u r e à soutenir une réaction t r i o m p h a n t e ; de ce côté, semblait-il, il n'y avait rien à faire qu'à attendre la consultation p o p u l a i r e , et les agents royalistes de P a r i s n'avaient qu'à entretenir un aussi bon esprit public. Les élections faites, u n e action simultanée eût été opérée par le comte d'Artois et par le prince de C o n d é ; le premier, débarqué en F r a n c e , aurait pris le c o m m a n d e m e n t de l'armée de C h a rctte, le second sur les b o r d s du R h i n se fût fait reconnaître de l'armée de Pichegru ; la royauté ainsi proclamée à l'Ouest et à l'Est, les deux armées devaient m a r c h e r t r i o m p h a l e m e n t sur Paris, où l'on avait l'assurance justifiée que la population accepterait l'aventure au m o i n s avec indifférence, peut-être m ê m e avec faveur. Dans ce projet, incontestablement habile, il y avait p o u r t a n t une lourde erreur, qui faisait attendre p o u r le réaliser que les élections eussent été faites et d o n n a s s e n t ainsi une apparence de légalité à de pareilles revendications. C'est là, au reste, une illusion, qui abuse souvent les chefs des oppositions heureuses, de vouloir que le peuple agisse légalement à leur place : décevant calcul dont ils eurent presque toujours des déboires. La mobilité est, en effet, l'essence du suffrage p o p u l a i r e , et i n n o m -

1. L'aînée s'appelait Anne-Madeleine et la cadette Louiie-Josèphe : elles habitaient au Marais, rue Ncuve-Saintc-Cathcrinc, n" 683 ; c'est à elle que lut adressée cette correspondance de la Villeurnoy, que publia M. Honore Bonhomme. (Cf. Ang« Pitou. Pièces remarquables. i' série.) c


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.