L'Univers. Histoire et description de tous les peuples

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BRÉSIL. torrents, quelque trésor ignoré qui les mît à même de demander leur grâce. Se berçaient-ils, comme on l'a dit sou­ vent, de l'espérance qu'ils parvien­ draient à découvrir un jour quelque riche mine d'or, entreprirent-ils quel­ ques travaux, ou le hasard eut-il seul part à leur bonne f o r t u n e , c'est ce qu'on n'a jamais pu complétement éclaircir. Ce qu'il y a de positif, c'est qu'après avoir erré durant six ans sans rien découvrir, nos exilés arrivèrent dans le nord-ouest, sur les bords d'une petite rivière qu'on nomme l'Abaëté, et qui est située à quatre-vingt-dix lieues environ du Serro do Frio. La tradition raconte qu'ils ne cherchaient que de l'or dans le lit desséché de ce ruisseau, lorsqu'ils trouvèrent un dia­ mant qui pesait près d'une once. Mal­ gré l'incertitude qu'ils conservaient sur la valeur réelle de cette pierre, pré­ cisément à cause de sa grosseur, ils éprouvèrent une joie facile à compren­ dre. Ils se confièrent d'abord à un curé, qui les accompagna sur-le-champ à Villa Bica,et qui remit le diamant de l'Abaëté au gouverneur général des mines. Là, tous les doutes que l'on avait manifestés d'abord se renouvelèrent; mais ils fu­ rent promptement dissipés. P a r les ordres du gouverneur, une commission spéciale s'assembla ; e t , après un sé­ rieux examen, il fut décidé que cette pierre était le plus riche présent que le Brésil eût encore fait à la couronne de Portugal. Les trois malfaiteurs reçu­ rent alors des lettres de grâce provi­ soires, et le curé partit immédiatement pour Lisbonne avec le riche dépôt qu'il avait reçu aux frontières de Goyaz. Là, le fameux diamant de l'Abaëté excita une admiration plus vive encore peutêtre que celle qu'on avait ressentie à Minas : les points de comparaison existaient pour les joailliers. C'était décidément le plus gros diamant qui existât dans aucun trésor royal. L'ec­ clésiastique en recueillit, dit-on, plus d'un privilége. Quant à Félix Gomez et à ses compagnons , l'histoire ne dit pas qu'on leur ait accordé la moindre récompense. On sait seulement que les lettres de grâce du gouverneur de Villa

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Rica furent ratifiées. On envoya surle-champ un destacamento (un poste) sur les bords de l'Abaëté, et cette ri­ vière fut mise immédiatement en ex­ ploitation; m a i s , jusqu'à p r é s e n t , on n'en a obtenu que des pierres d'une grosseur fort ordinaire, ou d'une eau qui n'a rien de remarquable. Quelque magnifique que puisse être un diamant tel que celui dont nous parlons ici, on sent combien il est dif­ ficile de l'utiliser d'une manière con­ venable, même dans un costume d'ap­ parat. Jean V I , qui avait la passion des pierres précieuses, l'avait fait per­ cer, et il le portait suspendu à son cou dans les j o u r s de cérémonie. PIERRES D E C O U L E U R . La recherche des autres pierres précieuses du Brésil n'est nullement soumise au régime ri­ goureux qui frappe le district Diamantin. Tout le monde peut se livrer libre­ ment à ce genre d'exploitation; e t , selon M. F r e y r e s , l'extraction de la topaze jaune rapporterait à elle seule une valeur de trente mille florins (*). Ce qu'il y a d'assuré, c'est que le prix que les mineurs attribuent sur les lieux mêmes aux pierres de couleur qu'ils viennent de découvrir, est en général fort exagéré. Quand ils se rendent dans les grands marchés du littoral, tels que Rio de J a n e i r o , Pernambuco et SanSalvador, ils éprouvent souvent un dé­ sappointement complet en voyant qu'on leur offre à acheter des pierres brutes, dont le prix est fort inférieur à celui qu'ils se croyaient en droit d'exiger sur les lieux mêmes d'exploitation. 11 y a, dans le commerce des cristaux colo­ rés et des pierres fines, un encombre­ ment qui se fait sentir jusqu'en Eu­ rope. Si l'on en croit quelques rapports, un genre de fraude, inconnu jusqu'a­ l o r s , se serait introduit dans le com­ merce des pierres précieuses du Brésil : (*) Le savant M. Warden cite un ouvrage manuscrit de Lastarria, qui évalue à plus de 700,000 pesos fuertes ou dollars, le revenu des mines de diamants, chrysolithes, topazes, rubis, améthystes et hyacinthes, découvertes, depuis 1 7 3 0 , dans le Rio das Caravellas et le Serro do Frio.


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