Recueil de divers voyages faits en Afrique et en l'Amerique

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Difcours

fupplée par des chevilles de bois, qu'on fait d'une des efpeces du Palmier; Le mefme Arbre fournit le Maft, & il ne faut pas beaucoup de peine pour le façonner. L'on fait des cordes de toutes façons du Cairo, c'eft à dire de l'écorce du C o c o : Les voiles font tiffuës des feüilles du Palmier qu'on appelle Cajuris, dont on fait auffi des facs, qu'on appelle Macondas, dans lefquels ils portent du Millet, ou ce qu'il leur plaift d'ail­ leurs. Cette noix fournit auffi du pain cy-deffus mentionné, foit fec, qu'on appelle Copra; ou verd, qu'on nomme P u t o , qui eftant rappé tk mis dans des Cannes creufes eft Cufcus. Il vient auffi de l'eau de ces mefmes Noix eftans vertes, devant que le Cerneau arrive à fa deuë confiftance, elle eft claire comme de l'eau de roche, tk plus fraîche tk meilleure encor. L'on fait de l'huile du Copra, c'eft à dire la Noix fechée au Soleil, dont tous les Indiens fe fervent beaucoup, n'en ayant point d'autre de leur c r u , outre celle qu'on tire d'une femence que l'on appelle Gergelim, qui eft de peu de va­ leur, tk dont il n'y a que les pauvres qui en ufent. Le Vin requiert plus de peine tk d'affiduité, lorfque le Pal­ mier pouffe fon jetton ou fon poyo, fait comme un cimeter­ re Morefque, devant que la grappe paroiffe, ils coupent la largeur de trois doigts de la pointe, & le lient prés de l'incifton avec un rofeau pour empefcher qu'il ne fe fende, puis ils mettent le bout du jetton dans une cruche, qui eft faire tout exprés, qu'on appelle Gorgo, l'y laiffant, les jettons com­ me des vignes qu'on a taillées , mais en plus grande abon­ dance, pleurent ce fuc qui devroit produire des Cocos. L'on retire cette liqueur deux fois dans un jour naturel, le matin celle qui a coulé pendant la nuit, & au foir celle qui a diftillé durant le jour. En ces temps - là un homme deftiné pour cette affaire, & d'une certaine extraction, appeliez Bandarins, avec une Gaule pendue à fa ceinture, tk une Ser­ pette en fa main, grimpe au plus haut des Palmiers, dont il y en a , particulierement de ceux qu'on appelle Cajuris, qui font d'une prodigicufe hauteur, fur qui ils montent comme fur une échelle par des coches qui font faites dans le tronc de l'Arbre, & avec autant d'affeurance que les Matelots mon­ tent au haut du Maft. En d'autres Palmiers qui font moin­ dres (qui femblent eftre de la race de ceux qui produifent des


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