Recueil de divers voyages faits en Afrique et en l'Amerique

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de l'Ifle des Barbades.

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D e plus ils fe fervoient d'une maniere d'agir à cet é g a r d , qui m e furprend & m'eftonne encor plus que tout cela, qui fut de leur voir empèfcher l'entrée du vent & le renfermer dehors, qui eftoit ce qui les pouvoit plus foulager pendant qu'ils eftoient prefque eftouffez de chaleur. C a r le vent fouflant toujours d'un mefme cofté, qui eft du cofté de l'Eft, ils devoient avoir fait toutes les ouvertures qu'ils auroient pû du cofté d'Orient, afin que les Brizes qui font fraifches y puffent entrer, pour les rafraichir à la venüe de la chaleur. Mais tout au contraire ils fermoient tout à fait leurs maifons du cofté d'Orient, & les ouvroient du coflé d'Occident, de forte qu'apres midy lors que le Soleil venoit à l'Oüeft, ces petites chambres dont la couverture eftoit fi baffe fembloient eftre des eftuves, o u des fours échauffez. Et en verité dans les jours chauds, il y avoit lieu de douter fi une il grande chaleur au dehors, & tant de T a ­ bac & de Tuë-Diable au dedans, n'eftoient pas plus que fuffifans pour y mettre le feu ; car ces trois chofes-là font de puiffans m o ­ tifs pour l'animer, & cependant on les y voyoit toujours. Mais enfin j'appris par eux la raifon de cette maniere irreguliere de baftir, mais qui eftoit appuyée d'un fondement trés-foib l e , & tres-peu confiderable, car ils difoient qu'au temps des pluyes qui y font frequentes, le vent pouffoit la pluye fi fort c o n ­ tre leurs feneftres, que les maifons en eftoient extremement in­ commodées au dedans; parce que n'ayant point de vitres pour l'empefcher, ils ne pouvoient s'affeoir ny le coucher la plufpart du temps en aucun endroit qui fuft fec, de forte qu'eftant c o n ­ traints de tenir ce cofté-là fermé pour refifter à l'eau, ils ouvraient la partie Occidentale de leurs maifons beaucoup plus qu'il n'eft neceffaire pour faire des feneftres, afin de fuppléer à ce defaut-là, & ainfi donner paffage à la chaleur, fans confiderer qu'on pou­ voit faire des volets & des contre-vents pour fermer les feneftres & empefcher la pluye qui les i n c o m m o d o i t , & donner paffage au vent pour les rafraichir quand ils voudraient, & pendant la chaleur, mais la plufpart des Habitans, & entrautres ceux qui n'eftoient pas des plus a c c o m m o d e z , ne fe foucioient pas beau­ coup de cela. J e trouvay pourtant à la fin que la veritable raifon de cela ve­ noit de leur pauvreté & de leur indigence, qui leur oftoit le moyen de fe pouvoir accommoder c o m m e il euft efté neceffaire, de forte que ne pouvant pas faire autrement, ils aimoient mieux I iij


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