Recueil de divers voyages faits en Afrique et en l'Amerique

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Histoire

& de mes p r o c h e s , je m e trouvay eftranger dans m a Patrie , ce q u i me fit refoudre de ne laiffer paffer la premiere occafion q u i fe prefenteroit pour me conduire en quelqu'autre partie du m o n ­ de que ce peuft eftre, quelque efloignée qu'elle fuft, pluftoft que de demeurer en Angleterre. Je ne demeuray pas long-temps en cette attente. U n A m y qui avoir autant d'envie de changer de Païs que m o y , m e fit une ouverture que j ' a c c e p t a y , de forte que le feiziéme j o u r de Juin 1647. ftyle d'Angleterre, nous nous embarquâmes aux Dunes , dans un Navire n o m m e l ' A c h i l l e s , du port de 350. t o n n e a u x , dont le Maiftre s'appelloit T h o m a s C r o u d e r , de Londres. Auffi-toft que nous fufmes tous e m b a r q u e z , o n leva les A n c h r e s , & o n fe mit en M e r , dans un temps qu'il faifoit fi froid pour la faifon o ù nous eftions, que je n'en ay jamais fenti un p a r e i l , qui continua jufqu'à ce que nous fuffions arrivez au Port de Falmouth , o ù nous entrâmes & demeurâmes une nuit ; mais pendant la route jufqu'ence lieu-là nous fufmes fort incer­ tains fur quelle Cofte nous eftions, à caufe de la varieté des V e n t s , & que le temps eftoit tout couvert de nuages , de forte que je remarquay plus d'inquietudes & de doutes dans l'efprit des Matelots pendant ce petit paffage-là, que dans tout le refte du voyage que nous fifmes enfuite. Mais c o m m e l'air fe fut éclaircy , le Maiftre& les Matelots ti­ rerent divers modelles& païfages, qu'ils avoient pris cy-devant fur les Cofles de France& d'Angleterre, qui font d'un grand ufage dans la M a n c h e , qui les affeurerent du lieu où ils eftoient ; parce qu'en ces endroits-là ils fe fervent peu fouvent de l'Arbaleftrille, mais feulement de la Bouffole & de la Carte marine , car dans un lieu fi eftroit il n'y a point d'autres adreffes que celles-là. N o u s fufmes environ dix jours à palier à F a l m o u t h , en c o m ­ pagnie d'un petit Navire n o m m é le Nompareil, du port d'envi­ ron 180. t o n n e a u x , qui appartenoit au Capitaine M i d d l e t o n , tres-intelligent en la M a r i n e ,& l'un des C o l o n s des Barbades, q u o y qu'il demeuraft lors à Londres. L e lendemain nous nous remifmes en M e r , continuant noftre route vers le Sud-Oüeft, avec fort peu de vent , en partie pour éviter les groffes vagues de la Baye de Bifcaye, mais principale­ ment pour ne point rencontrer les Pirates& les Corfaires, qui font fort frequens fur les Colles d'Efpagne & de Barbarie : &


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