Géographie complète et universelle. Tome 4

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LIVRE QUATRE-VINGT-ONZIÈME.

Nos métiers et nos arts ne sont pas étrangers à ces peuples barbares ; ils les exercent même avec adresse. Ils ont des tisserands, qui, avec des appareils très-simples et portatifs, fabriquent des étoffes de poils d'animaux, surtout de chèvre et de chameau ; ils ont même le secret de la préparation du maroquin. Ils savent employer à des usages utiles les peaux des lions, des léopards, des panthères, des hippopotames; ils amincissent les peaux d'agneaux jusqu'à en former des feuilles comme celles du papier; ils leur donnent ensuite différentes couleurs et les emploient à des ornements. Ils forgent des étriers et des brides d'une seule pièce, ainsi que des sabres et des poignards, dont ils savent incruster et damasquiner les poignées; ils en ornent les fourreaux de plaques d'or et d'argent. Enfin, ils ont des orfèvres et des bijoutiers ambulants qui fabriquent des bracelets, des chaînes, des anneaux d'or, des filigranes et des ornements arabesques, dont ils enrichissent avec beaucoup d'adresse les ornements pour la parure des femmes et des princes. La plupart des tribus dont nous venons de peindre en partie les moeurs ne nous sont connues que par ce que nous en ont appris quelques voyageurs, tels que Mungo-Park, le major Laing, Caillé, Richardson, ainsi que la caravane marocaine appelée akkabah qui se rend tous les ans à Tembouctou. Les akkabahs ne se dirigent point en ligne directe à travers l'immense désert de Sahara, qui n'offre nulle trace de chemin frayé; mais elles se détournent tantôt à l'ouest et tantôt à l' est, selon la position des oasis. Ces terres brillantes de végétation, semées dans ce vaste désert, comme les îles dans l'Océan, servent de lieu de repos et de rafraîchissement aux hommes et aux animaux. Telle est la violence du vent brûlant nommé samoum ou shoume, que souvent sa chaleur desséchante absorbe l'eau renfermée dans des outres que portent les chameaux pour l'usage des marchands et des conducteurs. Un monument attestait, du temps de Léon l'Africain, la fin déplorable d'un conducteur et d'un marchand- dont l'un avait vendu a l'autre, pour 10,000 dragmes d'or, la dernière jatte d'eau qui lui restait. Tous les deux avaient péri. En 1805, une akkabah composée de deux mille personnes et de dix-huit cents chameaux, n'ayant point trouvé d'eau aux places ordinaires de repos, hommes et animaux, tous périrent de soif. La véhémence du vent brûlant, qui dans ces vastes plaines soulève et roule des flots d'un sable rougeàtre, donne au désert une telle ressemblance avec l'Océan agité par les vagues, que les Arabes le nomment une mer sans eau (el bahar billâ mâa). Ils connaissent assez la position des constellations


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