Géographie complète et universelle. Tome 4

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LIVRE QUATRE-VINGT-ONZIÈME.

qui parlent presque tous un espagnol corrompu et qui font un commerce assez considérable avec l'Espagne et l'Angleterre. Ses rues, comme dans tout l'empire de Maroc, sont étroites et sinueuses, et dans certains quartiers elles sont couvertes comme à Fez et forment une suite de longues galeries sombres bordées d'échoppes. On vend dans les unes diverses marchandises, et les autres sont occupées par des ateliers de cordonnerie dont les produits abondants sont plus estimés que ceux même de Tanger. Il est curieux de voir dans ces rues privées d'air le marchand marocain dans sa boutique lilliputienne, qui n'a pour toute ouverture qu'une petite porte qui ressemble plutôt à un volet. Là, durant le peu d'heures destinées aux affaires, assis les jambes croisées au centre de son étroit magasin, il lui est facile, sans quitter sa place, de fournir ses pratiques qui attendent en dehors; car, à la distance du bras, il a autour de lui des tiroirs contenant tout ce qui concerne son négoce. Il est toujours occupé à lire à haute voix dans son Koran, d'un air composé, accompagné de balancements semblables à ceux des juifs pendant leurs exercices religieux, et il ne quitte sa lecture qu'à l'arrivée des chalands. Les environs de Tétouan sont remplis de jardins riches en excellents fruits, particulièrement en oranges ; les raisins abondent aussi sur son territoire. Après avoir doublé le cap Spartel, remarquable par une belle masse de basalte en colonnes, on rencontre sur le bord de l'Océan, à l'embouchure du Loukkos, Larache ou Εt'-Araich, dont le nom signifie le jardin de plaisir, probablement parce qu'elle est entourée de vergers, de jardins, de bois d'orangers et de palmiers. Plusieurs géographes la représentent comme une ville considérable ; mais elle n'a que 2 ou 3,000 habitants : il est vrai que depuis 4780, son commerce est beaucoup moins important qu'à cette époque. On peut même dire que cette ville décroit de jour en jour. Son port, encombré par les alluvions du Loukkos et par une barre de sable qui s'y forme, ne peut recevoir que des navires de 100 tonneaux. C'est dans une baie voisine que stationne l'hiver la flotte impériale. Larache paraît être bâtie près de l'emplacement de la Lixa de Ptolémée. Elle doit sa fondation à un fils du grand El-Mansour, que les Espagnols nomment Al-Manzor; on y voit quelques restes de fortifications et 14 mosquées. Ses rues sont pavées, et traversées pour la plupart par des chemins voûtés. Ses maisons sont couvertes en tuiles. En un mot, elle se distingue de toutes les villes de l'empire de Maroc par ses constructions. C'est près d'El'-Araich, à 1 myriamètre environ au sud-est, que se livra, le 4 août 1578, la fameuse bataille si improprement nommée d'Alcassarquivir, où périrent à la fois le roi don Sébastien de


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