Journal du voyage fait par ordre du Roi à l'Equateur

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HISTORIQUE.

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Autant les pluies avoient été exceffives cette année à Quito, autant la neige étoit tombée abondamment fur les montagnes. Le haut de Pitchincha, qui, dans la belle faifon, eft fouvent prefque dénué de neige, en étoit entièrement couvert plus de 100 toifes au deffous de la cime, à l'exception des pointes de rocher qui débordoient dans quelques endroits. Nous faifions tous les jours des marches de fix ou fept heures à pied, tournant autour de cette maffe, fans pouvoir en atteindre le fommet. Tout le terrein du côté de l'orient étoit coupé de ravins creufés dans les fables par la chute des eaux : nous ne pouvions les franchir que difficilement, en nous aidant des pieds & des mains. Nous regagnions notre tente à l'entrée de la nuit bien fatigués, & très-peu inftruits de ce que nous voulions favoir. Le 16, j'efcaladai, avec beaucoup de peine, un des rochers faillans dont le talus me parut fort roide : au delà, le terrein étoit totalement couvert, d'une neige où j'enfonçois jufqu'au genou. J e montai de la forte huit à dix toifes ; je trouvai enfuite le rocher nud : puis alternativement d'autre neige & d'autres pointes faillantes. Un épais brouillard qui s'exhaloit de la bouche du volcan, & qui fe répandoit aux environs, m'empêcha de rien diftinguer : je revins à la voix de M. Bouguer, qui étoit refte en bas, & dont je ne voulois pas me trop écarter. Nous abrégeâmes beaucoup le chemin au retour, en marchant à mi - côte fur le bord inférieur de la neige, & un peu au deffus de l'origine de ces cavées profondes, qu'il nous avoit fillu monter & defcendre l'une après l'autre en allant à la découverte.

1742. Juin.

Nous remarquâmes fur cette neige la pifte de certains Efpèce de lions. animaux qu'on nomme lions à Quito, quoiqu'ils reffemblent fort peu aux vrais lions, & qu'ils foient beaucoup plus petits : ils ne laiffent pas de chaffer les cerfs & les dains du pays, plus petits auffi que les nôtres. En revenant, je Autres tentatives. remarquai un endroit où la pente étoit beaucoup plus douce & ficilitoit l'accès du fommet de la montagne : je tentai de m'en approcher ; les pierres ponces que je rencontrois fous V


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