Notes sur les Guyanes française, hollandaise anglaise, et sur les Antilles françaises

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( 55 ) son maître : veut-on avoir une idée de la manière dont la justice traite le maître qui abuse de son pouvoir? Quelque temps avant mon arrivée, un propriétaire irrité et mécontent de trois négresses, qui avaient fait une faute grave, leur avait fait donrer à chacune quinze coups de fouet. quoique la loi défendît à Demerary de faire fouetter les femmes. Plainte est portée par ces négresses, et le propriétaire se voit condamné, d'après le témoignage fourni par l'une d'elles, à 300 francs d'amende. Prévoyant une condamnation semblable pour les deux autres plaintes portées contre lui, il fit proposer au protecteur des esclaves de donner la liberté à ces trois femmes, à condition que la poursuite cesserait d'avoir son cours. L'offre fut acceptée, et le propriétaire perdit pour ce fait ces trois esclaves : en général, peu de propriétaires sont traduits pour des faits de cette nature; ce sont presque toujours des géreurs, des économes, contre lesquels des plaintes sont portées, et qui sont quittes pour des amendes de 10 à 15 francs, lorsqu'il n'y a qu'abus d'autorité, et non pas violation complète des règlements. Cette position des esclaves n'a pas encore satisfait l'Angleterre , qui vient de faire proclamer leur liberté par un acte du parlement. Au premier août 1834, le bill a dû être mis en vigueur. On ne peut se dissimuler que ce bill ne fasse du tort aux propriétaires, l'indemnité accordée étant très-faible; aussi les habitants se plaignent beaucoup, mais ils ne croient pas que cet acte détruise complètement leurs propriétés : s'ils le pensaient, depuis un an qu'ils le connaissent, ils auraient cessé de s'occuper, par des améliorations coûteuses, à augmenter leurs revenus; je n'aurais pas trouvé de nouvelles machines qu'on installait, des fourneaux, des chemins en fer qu'on montait; ce n'est pas avec l'idée de voir les établissements annulés que partout on les augmenterait: non; ils comptent, et quelques-uns l'avouent, sur le travail libre de leurs nègres après l'émancipation; d'autres même comptent sur un renfort de Travailleurs, qui leur viendront du sol usé des Antilles, pour cultiver leurs terres, qui sont si fertiles, qu'elles n'ont jamais besoin d'être fumées.


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