Etude pratique sur les colonies anciennes et modernes

Page 60

— 272 —

Antilles ou le prix devait s'avilir dans la métropole. Néanmoins, on maintint l'étrange système ; mais ce qui était à prévoir arriva. En 1713, le prix du sucre, qui était de 14 à 15 francs le quintal en 1682, tomba à 6 et 5 francs. C'était un coup terrible pour l'industrie sucrière. Aussi, à partir de 1717, — il avait fallu encore quatre années de réflexions avant de prendre une mesure urgente — toutes les marchandises, et notamment le sucre, venant des colonies, furent autorisées à sortir de France, moyennant un droit de trois francs. Les sucres d'origine étrangère furent frappés d'une lourde taxe. En outre, toutes les marchandises françaises destinées aux colonies furent affranchies de tous droits, et les droits sur les produits des colonies destinés à la France furent considérablement diminués. De plus, le monopole des compagnies fut supprimé, sauf à la côte de l'île de Saint-Domingue qui dépendait de la Compagnie des Indes. Toutes ces réformes et mesures produisirent le meilleur effet et donnèrent une incroyable impulsion au développement industriel et commercial. Une prospérité, inconnue jusqu'alors, en fut le résultat. Voici quelques chiffres qui peuvent en donner une idée. La Martinique qui n'avait pas plus de 15,000 Noirs travaillant dans ses plantations en 1700, en comptait plus de 72,000 en 1736. Les capitaux y abondaient et les marchandises européennes y arrivaient en énormes quantités. Dans ses ports, elle recevait chaque année, en moyenne, 300 navires français et 30 navires canadiens. La Guadeloupe, pendant la même période, avait fait également de grands et constants progrès, moins notables cependant que ceux signalés à La Martinique. Le café, introduit de la Guyane hollandaise dans ces deux colonies, y avait réussi à merveille; il donnait d'opulentes récoltes et contribuait puissamment à la prospérité et à la richesse de ces colonies. Le coton de la Guadeloupe avait conquis une place importante sur les marchés européens et notamment en Alsace et dans la Flandre, célèbres par leurs grandes manufactures. De son côté, Saint-Domingue tenait le sceptre de la production du sucre, aucun pays du monde ne pouvait le lui disputer. En 1711, ses exportations de sucre ne se chiffraient que par une valeur de 11 millions de livres tournois; en 1788, elles s'élevaient à 193 mil-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.