Etude pratique sur les colonies anciennes et modernes

Page 105

— 101 — patricienne, ne ressemblaient en rien aux maigres et modestes consuls des temps actuels. On exigeait qu'ils eussent à leur suite un notaire, un médecin, un chapelain, au moins sept serviteurs, deux écuyers et dix chevaux. Pour suffire aux frais d'une pareille représentation, on leur permettait de lever, sur le commerce de leur juridiction consulaire, un droit calculé d'après l'importance du trafic, mais qui ne pouvait dépasser deux pour cent. Le revenu des consulats de Syrie et d'Alexandrie était évalué à vingt cinq mille ducats par an, soit plus de cent vingt mille francs de notre monnaie actuelle." Intéresser les consuls au mouvement commercial du pays, où ils représentaient la République de Venise, était un acte d'intelligence qui mérite d'être signalé.

Sans doute on se demandera d'où l'on pouvait tirer assez d'hommes pour conduire tant de vaisseaux, pour soutenir tant de guerres sur terre et sur mer, élever des monuments, creuser des canaux et monter tous les jours de nouveaux ateliers qui exigeaient un grand nombre de bras. En effet, au X V siècle, le seul arsenal de Venise occupait seize mille ouvriers et trente six mille marins. Cependant cette capitale n'avait guère que deux cent mille habitants. Les Vénitiens trouvaient dans leurs colonies tout ce qui leur était nécessaire. Les Dalmates fournissaient des soldats à la métropole et contenaient les colons dans le devoir. Les îles fournissaient des matelots; les matelots procuraient la richesse. Ces richesses servaient à soudoyer les compagnies de stipendiaires qui devaient conquérir à la République des provinces sur le continent; et les stipendiaires, les milices provinciales et les marins s'employaient à leur tour à tenir les Dalmates en respect. Cette réaction continuelle des diverses classes de la population, l'une sur l'autre, produisait cet effet de les attacher plus ou moins au gouvernement par les liens de l'intérêt. Une paie très avantageuse attirait les soldats étrangers sous les drapeaux de la République, et un bon salaire attirait les meilleurs ouvriers dans les ateliers de Venise. Les armes, les glaces, les étoffes sortaient de ces ateliers pour aller payer toutes les marchandises de l'Europe et de l'Asie. e


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.