ET L'ESCLAVAGE.
441
Maroc ; m a i s ce fut seulement sous le roi Louis XVI q u e cette belle œuvre fut accomplie p a r le rachat des derniers esclaves c h r é t i e n s , au n o m b r e de 3 1 4 , vers l'époque où ce grand et infortuné m o n a r q u e abolissait les d e r n i e r s restes de la servitude dans les d o m a i n e s royaux (1779). Étrange
contraste ! A ce m o m e n t ,
en Afrique, on
achève de r a c h e t e r les esclaves; en A m é r i q u e , l'escla vage va p r e n d r e de l a m e n t a b l e s développements ; en E u r o p e , Dieu suscite u n m o u v e m e n t d'opinion qui va g a g n e r à jamais la cause des esclaves devant la conscience, et a r m e r pour l'abolir les deux p r e m i è r e s n a t i o n s du m o n d e . L'esprit de la Révolution française, au
moins
s u r cette q u e s t i o n , sut d e m e u r e r c h r é t i e n , et c'est p o u r pauvres esclaves jugeront tant de chrétiens qui abusent de tant de belles commodités qu'ils ont d'avancer si facilement les affaires de leur salut? » Ces pieux sentiments des rédempteurs n'inspiraient pas toujours les r a chetés. Rien de plus ridicule que les Lettres
du captif
racheté
un siècle
après, 1785. Il a été séparé, avant de l'épouser, d'une adorable Eugénie. écrit à son futur beau-père. L'éditeur a publié ces lettres pour intéresser âmes sensibles en leur apprenant
les malheurs
d'un jeune
taire privé de toutes les douceurs
que lui promettaient
et pour satisfaire
le philosophe
en lui faisant
les particularités
souvent
curiosité.
singulières
et,
mili l'amour,
un pays
dont
ont droit de piquer
sa
C'est à peine si, après des récits plus ou moins sérieux, le captif
rend grâces aux soins paternels
qu'ont pour lui les chanoines de la Sainte-
Trinité qui ont obtenu de notre Roi la permission allégresse ressentiront éperdue
connaître
et bizarres,
et brave
l'hymen
Il les
ces vertueux
voler au-devant
religieux,
de son époux,
est bon, et que la sensibilité
de nous racheter. lorsqu'ils
etc. Tant il est vrai
de son cœur ne paraît jamais
Quelle
verront
l'épouse
que
mieux
l'homme que dans
ces grands spectacles. Ce jargon sent son époque; il a sa place marquée entre Rousseau et Robespierre. J'en veux tirer une seule conclusion, c'est que pour se vouer à la rédemption des captifs, les enfants de Pierre Nolasque et de Jean de Matha avaient besoin d'un autre attrait que la reconnaissance, d'une autre permission que celle du roi ; racheter des esclaves, c'est plaire à Dieu, une telle charité n'a pas d'autre explication, ni d'autre récompense.