L' Abolition de l'esclavage, tome 1

Page 88

306

ABOLITION DE L'ESCLAVAGE.

l'île pendant trois ans. Le culte fut confié aux lazaristes à partir de 1736, et lorsque, pendant la Révolution, la colonie s'administra elle-même, les biens des lazaristes furent confisqués, mais le culte ne fut pas aboli. Toutefois on peut dire que la religion mourut. La loi du divorce désorganisa les familles des blancs; si elle n'eut pas le même effet sur les noirs, c'est que le mariage leur était inconnu. Les missionnaires du Saint-Esprit trouvèrent à leur arrivée en 1818 trois cures vacantes sur onze, nulle instruction, nulle piété; les progrès furent bien lents, et le principal obstacle fut la résistance de la plupart des maîtres, résistance à laquelle la fatalité d'une situation fausse les condamnait bien plus que la dureté du cœur. Je lis toujours dans les correspondances de cette époque la même disposition : Quelques colons font exception et sont des modèles; pour eux, pour leurs femmes surtout, les esclaves sont une famille. Pour d'autres, ils sont un bétail; quand l'esclave a assez travaillé pour payer ce qu'il coûte, il peut mourir. Entre ces deux extrêmes, il plairait à un grand nombre de maîtres de choisir entre les ver-

tus chrétiennes, de détacher de l'Evangile les pages sur la patience en effaçant les pages sur l'égalité, et de mar-

cher accompagné de deux hommes, l'un portant une croix pour prêcher la soumission, l'autre un fouet pour l'imposer. Ils accepteraient l'instruction qui développe les facultés si elle n'élevait les sentiments. Ils donneraient une heure à l'école s'il ne fallait pas l'enlever au labour. Faut-il ajouter que l'autorité supérieure lit pendan1

longtemps peu de chose pour changer un étal de choses


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.