L' Abolition de l'esclavage, tome 1

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ABOLITION DE L'ESCLAVAGE.

compte à les conserver; de l'État, enfin, qui aurait payé en pure perte, si, avant dix ans, un événement imprévu modifiait la loi. En somme, c'était faire payer par les esclaves eux-mêmes une moitié de leur liberté, pour exonérer l'Etat, à peu près comme on fait payer un apprentissage à la famille d'un enfant, quand elle accorde du temps, ne pouvant payer d'argent. L'indemnité devait être répartie entre les colonies au prorata de leur population, puis sous-répartie entre les colons, non par tête d'esclave; mais, ce qui était plus juste pour les petits possesseurs, à raison de l'âge, du sexe, etc., suivant des catégories de détail à établir par ordonnances royales. Les invalides étaient déjà tombés à la charge des maîtres; ils y resteraient. 4° L'expérience anglaise prouvait la nécessité de mesures prises d'avance pour assurer le Iravail après l'émancipation. L'indemnité était destinée à faire que le salaire ne manquât pas au travail; comment faire pour que le travail ne manque pas au salaire, ou pour que le salaire, devenant exagéré, n'absorbe pas le capital, double chemin conduisant à un même abîme, la ruine complète? « En aucun pays, l'homme ne travaille plus que ses besoins, en aucun pays l'homme ne travaille volontiers pour autrui, quand il peut travailler pour lui-même. » Or il y avait à craindre que le nègre, ayant peu de besoins, facilement satisfaits dans ces beaux climats, travaillât infiniment peu. Dans les colonies anglaises, cette inquiétude n'avait pas été confirmée en général ; le nègre s'était montré actif, industrieux, amateur du luxe, du bien-être, ou avare, bien plutôt que paresseux et in-


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