L' Abolition de l'esclavage, tome 1

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ABCLIT ION

DE L'ESCLAVAGE,

hommes. Il fallut des soldats, des menaces, des sévérités, pour rétablir l'ordre, qui n'avait pas été troublé par la liberté, ne l'oublions pas, à Bourbon et à la Martinique; il ne put être rétabli à Saint-Domingue, à jamais perdue pour la France l. La Guadeloupe faillit avoir le même sort : prise en 1810 par les Anglais, cédée aux Suédois (1813), rend ue à la France, reprise, elle fut enfin restituée le 25 juillet 1816, trois mois après la Martinique, rendue

en

1802, reprise en 1807, rendue par les traités de 1815. Les mêmes traités nous restituèrent Bourbon, qui, prise en 1810, nous revint en 1815, mais sans l'île de France, après avoir soutenu un blocus pendant les Cent-Jours, plutôt que de se mettre sous la protection des Anglais. Depuis cette époque, ces colonies purent enfin jouir, avec la France, des bienfaits d'un gouvernement régulier. Mais il en fut de la liberté des esclaves comme de tant d'autres principes proclamés au moment de la Révolution. Une fois répandus dans le monde, ces principes ne mourront pas, mais leur victoire sera contestée et laborieuse ; ils semblent condamnés à expier par de longs atermoiements les excès d'une explosion trop hâtive, et à s'en pu1

Le chef de brigade Navery écrivait de Saint-Domingue au minisire de la

marine, le 2 ventôse an XI * : « Je préviens le général Dugua que, quoique les nègres fussent rentrés au travail, ils me paraissaient bien décidés a ne pas se laisser désarmer, parce qu'on voulait les tromper sur leur liberté... Jusqu'aux femmes, qui, prenanl leurs enfants par les pieds, en leur écartant les jambes, me disaient : « Voilà « ce que nous leur ferons, nous les écartellerons plutôl que de souffrir « qu'ils deviennent esclaves! » * Archives coloniales,

lettre inédite


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