L' Abolition de l'esclavage, tome 1

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ABOLITION DE L'ESCLAVAGE.

Qui donc, encore une fois, a empêché le colon, avant cette redoutable concurrence, de réaliser tous ces progrès ? Un témoin compétent et bien informé écrivait en 1847 à la Martinique des paroles qui peuvent être appliquées à toutes les colonies à esclaves et sont la meilleure réponse à cette question 1. « L'agriculture est ici à un état presque sauvage, qui demande aussi son émancipation. Avec une incroyable exubérance de bras, le tiers à peine des terres est en valeur. Des terres en rapport sont abandonnées chaque jour pour des défrichements nouveaux; l'esclave s'éreinte à tenter les cultures les plus barbares avec des instruments impossibles, et, les procédés de fabrication aidant, on obtient du sol le quart à peine de son rendement... Que peut importer une amélioration agricole à des hommes dont la condition semble ne devoir jamais être améliorée? Et comment ne pas comprendre le dégoût des colons devant l'insuccès des épreuves? L'esclave déteste le sol, l'homme de couleur et l'affranchi le méprisent, et le blanc l'exploite à la hâte, comme une mine qu'on fouille avidement, avec la pensée d'un prochain abandon... » Dès 1843, l'illustre M. Rossi résumait les traits de ce tableau par ces mots : « Ce que le colon doit redouter, ce sont ses habitudes 2. » 1

M. Garnier, employé à la direction de l'intérieur à la Martinique. Rev.

col., p. 138, 1847, t. XII. 2 V. aussi les excellentes pages 18, 19, 22 du rapport de M. Benoist d'Azy.


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