L' Abolition de l'esclavage, tome 1

Page 145

COLONIES FRANÇAISES.

103

On les vit naturellement déserter la grande culture, et en particulier les habitations où ils avaient souffert, et se diviser en trois classes : les paresseux, qui se crurent appelés à la liberté de ne rien faire; et les diligents, les uns cherchant à s'occuper dans les villes, les autres demandant l'autorisation de défricher une parcelle des biens domaniaux incultes. Même parmi ceux qui consentirent à travailler sur les habitations, une grande irrégularité se fit remarquer : changer d'avis, de situation, de lieu, dut être la première fantaisie d'êtres toujours assujettis au même labeur sur le même champ et sous la même autorité. Les colons courageux et qui prirent vite leur parti souffrirent moins que les colons découragés, moins que ceux qui avaient coutume d'agir par l'entremise de géreurs coûteux, souvent durs et détestés, ou que ceux qui, grevés de dettes, furent obligés de liquider leur situat ion au moment le plus critique. Mais il est très-certain que le désordre ne naquit pas à la Guadeloupe avec l'émancipation, mais seulement par les conséquences de la révolution. Ainsi une grande partie de la perte de temps des anciens esclaves vint de leur assujettissement à de nombreuses formalités, nonseulement pour se faire enregistrer à l'état civil et obtenir

la délivrance des titres de liberté auxquels ils atta-

chaient une importance légitime, mais encore pour exercer les droits politiques. On ne les troubla pas en les reconnaissant hommes, on les agita en les improvisant citoyens. Encore les premières élections se passèrent-elles si-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.