FORÇATS
ET
PROSCRITS
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Le voilà donc, pense chaque passager, le voilà le pays de l'exil et de la déportation, le pays des fièvres et des miasmes empoisonnés, le pays des larmes et des infinis désespoirs ! En
face de cette terre mystérieuse et
lugubre, muette c o m m e u n cadavre, l'idée de la mort
possible, probable, peut-être
prochaine, surgit immédiatement. Les visages deviennent graves et plus d'un fonctionnaire ou employé, que le gouvernement envoie « continuer ses services » à la Guyane, jette sur ses enfants et sur sa f e m m e , qu'il regrette d'avoir e m m e n é s , u n regard anxieux. Cependant, on ne tarde pas à avoir connaissance, par bâbord, d'un groupe d'îles. A mesure qu'on s'en approche, leur configuration se dessine, leurs reliefs s'accentuent; maintenant on distingue très bien que l'une d'elles est assez boisée, que les deux autres sont, au contraire, dénudées; enfin — constatation qui est u n véritable soulagement
—