Après le bagne !

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PREMIÈRE NUIT DE LIBERTÉ

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— J'ai cherché un peu partout, dit-il, et, de guerre lasse, j'ai loué ici pour 15 francs par mois... Encore ne puis-je qu'y passer la nuit. Le propriétaire, qui est épicier et Arabe, se réserve le droit de placer dans ma chambre tout ce qui le gêne dans son magasin... Je regrette, ajoutat-il, de n'avoir pas à t'offrir un logement et un lit plus confortables, mais à l'impossible n u l n'est tenu... Tu verras, tu verras que tout n'est pas rose ici ! Ce disant, il s'allongea dans son hamac. Il était tard, je ne connaissais personne à Cayenne et je n'avais pas un sou en poche. Je m e décidai à m'étendre tout habillé sur la cou­ chette que m'offrait généreusement mon ami. Quelle nuit! Suspendu au-dessus des tessons de bouteilles et des estagnons de fer-blanc, dévoré par les moustiques géants et les maringouins dont le dard peut traverser une couverture de laine pour atteindre les dormeurs, il me fut impossible de me livrer au sommeil. J'avais connu au bagne des jours et des nuits pénibles; dormir sur la planche et les fers aux pieds n'était certes pas condition très agréable, mais j'étais forçat, et cette situation pouvait


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