Après le bagne !

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APRÈS LE BAGNE !

Il y avait huit jours que nous étions incarcérés et l'instruction n'était pas encore ouverte. Enfin, le commissaire rapporteur qui en était chargé, un nègre du nom de Tel, me fit appeler. S'il me faisait l'honneur de commencer par moi la série des interrogatoires, c'est que, dans son esprit, les douze libérés dont on venait d'opérer la capture constituaient une bande organisée dont j'étais le chef. Ce « bois d'ébène » était fort instruit, il jouissait d'une mémoire prodigieuse et se sou­ venait à merveille de tout ce qu'on lui avait inculqué dans les écoles. C'était, en revanche, un piètre juriste, igno­ rant des multiples ruses qui constituent l'ordi­ naire bagage des magistrats instructeurs, et qui n'était servi dans sa fonction que par la haine implacable qu'il avait vouée aux gens de race blanche. Le premier jour de l'enquête, il ne fit amener que moi dans son bureau. Le lendemain et le surlendemain, il appela les onze autres prévenus, auxquels il attribuait beaucoup moins de responsabilité puisque, selon lui, j'étais l'instigateur de la fugue et le pour­ voyeur des moyens.


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