A LA G U Y A N E
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F R U C T I D O R ) .
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bandeau des incrédules pouvait tomber; tant de mains essayaient de l'arracher ! Alors le monstrueux écha faudage de leur conspiration croulait et les écrasait sous ses débris. A u milieu de toutes ces trames dont je tenais les fils, je provoquais tous les jours des réunions, j'y produisais les preuves les plus évidentes de l'attaque qui se pré parait, et tous les jours on devenait plus froid, plus in différent. L e grand argument des raisonneurs était celui-ci : « Si le Directoire viole la Constitution au point de porter atteinte à la liberté des législateurs, il détruit sa propre existence politique, il se perd luim ê m e ; ce serait u n véritable acte de délire ; nos gou vernants tiennent trop à l'autorité pour la compro mettre aussi évidemment. » E t parmi ces raisonneurs se trouvaient des vétérans de la Révolution! P o u vaient-ils cependant avoir oublié qu'à toutes les crises révolutionnaires, les factieux ne s'étaient jamais occu pés d u lendemain; q u e s'ils voyaient ou croyaient voir quelques dangers les menacer, ils n e s'attachaient qu'aux m o y e n s de les écarter; qu'aucune violation, au c u n crime ne leur coûtaient pour y parvenir; que tout, e n u n m o t , était sacrifié à leur sûreté actuelle, sauf à recourir ensuite à de nouveaux forfaits pour conjurer les nouveaux orages auxquels leur audace avait p u les exposer? C e calcul était encore celui des conspirateurs. Rien ne leur paraissait plus funeste pour eux q u e le c o m p l é m e n t d u Corps législatif en h o m m e s animés de l'amour d u bien public : rien donc ne devait les arrêter pour l'empêcher; et d'ailleurs, n e savaient-ils pas qu'il n'est point de crime politique q u e le succès ne justifie a u x y e u x de la multitude ? L'essentiel pour eux était d e ne point échouer. Pouvaient-ils le craindre, lorsque nous concourions si puissamment n o u s - m ê m e s à assu rer leur réussite? A u c u n e de ces réflexions ne put ébranler la sécurité