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LA D É P O R T A T I O N D E S D É P U T É S
compte vraisemblablement des capteurs. Le capitaine anglais et son équipage furent pris à notre bord ; mais ls n'y restèrent que trois jours. Le 28, nous rencon trâmes, au delà du tropique, un vaisseau sous pavillon suédois ; il fut chassé et joint par la Vaillante ; sa des tination était pour Saint-Barthélemy. Après avoir été très sévèrement visité, il reçut à son bord le capitaine et les matelots anglais, qui s'estimèrent beaucoup plus heureux d'aller à Saint-Barthélemy qu'à Cayenne. Cependant, nous approchions de cette terre d'exil ; après l'avoir tant redoutée, nous désirions ardemment y arriver. Notre situation était si pénible !... De vions-nous présumer qu'elle le deviendrait encore davantage ? Nous aurions, dès le trente-huitième jour de notre navigation, atteint la hauteur du cap Nord, si notre marche n'eût pas été ralentie par un calme ; il nous tint en panne cinq jours entiers, pendant lesquels nous eûmes beaucoup à souffrir de la chaleur et de l'odeur de notre réduit. Cependant on n'omit aucune des pré cautions propres à nous soulager; il était nettoyé, par fumé tous les jours, on y avait placé un ventilateur; enfin, on laissait à ceux qui se trouvaient trop incom modés la faculté de rester m ê m e la nuit sur le pont. Il arriva enfin, ce moment impatiemment attendu. Le 10 novembre, nous fûmes réveillés par ces cris : « Terre ! terre ! » et nos âmes s'ouvrirent encore une fois à l'espérance. Nous nous élançâmes sur le pont; mais nous ne pûmes apercevoir que des masses confuses qu'on nous dit être l'atterrage du cap Nord. Le chan gement de la couleur des eaux atteste, en effet, que nous n'en sommes pas très éloignés, et déjà notre ima gination parcourt ces vastes contrées, y cherche des consolations, des amis, et conçoit le doux espoir d'en trouver : la liberté surtout va succéder à la plus dure captivité, et, loin des oragesquidésoleront encore notre