Journal d'un député non jugé, ou déportation en violation des lois : Tome I

Page 21

CHAPITRE

II.

15

» carde est très-attentive et en prendra le plus » grand soin dans la traversée. » Rovère ne voulait pas que sa f e m m e vînt a Sinnamari , partager avec lui sa chaumière , et respirer u n air h u m i d e et malsain. Elle s'exposait à toutes sortes de dangers pour le rejoindre. Son courage et ce

dévoûment

conjugal et pieux

avaient inspiré u n intérêt général. Rovère dem a n d a et obtint de louer une habitation qu'on lui avait indiquée dans le voisinage de Cayenne. Quoique tourmenté de la fièvre, il s'embarqua sur une goëlette dont la chambre n'était qu'un coffre, où l'on put à peine placer son matelas. Il fallait, pour aller à Cayenne , naviguer contre le vent et le courant. Son état empira par ces contrariétés, et, au bout de deux jours , je vis rentrer à Sinnamari le petit navire sur lequel on l'avait embarqué. « J'ai fait de vains efforts, m e » dit le patron. La m e r était grosse; monsieur » Rovère a été plusieurs fois sans connaissance; » quand il revenait à lui, il parlait de sa f e m m e , » c o m m e si elle était déjà arrivée; mais q u a n d » m ê m e j'aurais p u gagner Cayenne, il n'y se» rait point entré vivant; et je suis sûr, ajouta-t-il » naïvement, qu'il m'eût fallu annoncer à m a » d a m e que j'avais jeté à la m e r le corps de m o n » sieur.» Il était en effet mourant ; on le hissa de la goë-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.