Une erreur judiciaire : L'affaire Dreyfus

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UNE

ERREUR

JUDICIAIRE

ture normale de l'écrivain des pièces de comparaison eût été modifiée et contrefaite par leur écrivain, soit dans la pièce de question, soit même dans le document du 21 janvier 1895, il serait inadmissible qu'une pareille falsification se fût produite également dans les documents de 1890 et 1893, en sorte que ces derniers documents qui ne diffèrent d'ailleurs pas sensiblement dans leur graphisme de celui de 1895 contiennent dans tous les cas des éléments de comparaison sérieux et normaux de l'écriture naturelle de l'écrivain auquel on attribue le graphisme de la pièce de question. Si donc on estime que ces deux écritures contiennent dans une plus forte proportion les éléments graphiques diosyncrasiques de l'écrivain hypothétique de toutes les pièces versées à l'expertise et au sujet de la conformité ou de la non conformité desquelles avec l'original non produit, il est utile de faire les réserves les plus étendues, on peut comparer spécialement les éléments graphiques de la pièce de question avec ceux des documents de 1890 et 1893, et il suffira d'un simple coup d'œil pour s'assurer que les analogies sont encore moins nombreuses que dans la comparaison faite spécialement avec la lettre du 21 janvier 1895. Dans cette pièce, d'ailleurs, un seul élément graphique, malgré des différenciations que pourraient peut-être mettre en relief des mensurations strictement mathématiques, peut prêter à discussion, c'est la lettre C ; la lettre M, par son moulage calligraphique extraordinaire et sa liaison, ne pouvant être comparée à aucune autre de même nature, et il n'en existe pas au surplus du même type pouvant servir de point de repère. Or, sur cent écritures prises au hasard, il y en a toujours un certain nombre relativement très élevé qui présentent communément deux ou trois formes graphiques analogues quoique émanant d'écrivains différents; il serait donc illogique absolument d'établir la conjecture d'un seul écrivain pour toutes les pièces de question et de comparaison, sur cette base unique d'analogie, alors même qu'elle serait renforcée de quelques autres similitudes générales et de détail ; de la, la nécessité de pousser plus avant encore le développement de la présente expertise (1).

(1) A la suite de cette sixième opération, M. G. Bridier avait intercalé deux silhouettes graphologiques démontrant que la personnalité de l'écrivain anonyme et celle du capitaine Dreyfus étaient absolument dissemblables. Ces silhouettes seront publiées ultérieurement.


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