266
DESCRIPTION GEOGRAPHIQUE
cela ne peut fe paffer tranquillement. On entend d'une ou deux lieues de diftance un bruit effrayant, qui annonce la Pororoca ; à mefure que ce terrible flot approche, le bruit augmente , & bientôt on voit un promontoire d'eau de douze à quinze pieds de haut , puis un autre , puis un troifieme , & quelquefois un quatrieme, qui fe fuivent de très près, & qui occupent prefque toute-la largeur du Canal. Cette lame avance avec une rapidité prodigieufe , brife & rafe en courant tout ce qui lui réfifte ; on voit en quelques endroits de grands terreins emportés par la Pororoca , de très gros arbres déracinés, des ravages de toute efpece ; par-tout où elle paffe le rivage éft net, comme s'il eut été balayé avec foin ; les Canots, les Pirogues, les Barques même n'ont d'autre moyen de fe garantir de la fureur de cette Barre, qu'en mouillant dans un endroit où il y a beaucoup de fond. M. de la Condamine ajoute que , fans entrer dans un plus grand détail du fait, ni de fon explication , il ne fera qu'en indiquer les caufes, en difant qu'après l'avoir examinée avec attention en divers endroits, il a toujours remarqué que cela n'arrivoit que lorfque le flot montant, & engagé dans un Canal étroit, rencontroit en fon chemin un banc de fable, ou un haut fond qui lui faifoit obftacle ; que c'étoit là & non ailleurs que commençoit ce mouvement impétueux & irrégulier des eaux ; & qu'il ceffoit un peu au-delà du banc, quand le Canal redevenoit profond , ou s élargiffoit confîdérablement. On dit qu'il arrive quelque chofe d'affez femblable aux Ifles Orcades au Nord de l'Ecoffe , & à l'entrée de la