Histoire du Dix-huit fructidor : deuxième partie

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DU

DIX-HUIT

FRUCTIDOR.

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La personne qui désiroit nous sauver jeta sur lui un regard de regret mêlé d'admiration , et s'éloigna. Il étoit dix heures du malin : nous partîmes enfin , et à temps. Les manœuvres séditieuses opéroient de plus en plus. Le rassemblement étoit beaucoup plus considérable qu'à notre arrivée, les insultes plus multipliées, les menaces plus vives; en un mot je ne sais trop ce qui seroit arrivé sans le courage du brave officier municipal qui protégea notre départ. Nous arrivâmes un peu tard à Amboise. Le mauvais état de la prison força Dutertreànous mettre à l'auberge. Le local n'étoit pas vaste : on nous entassa tous dans une petite chambre, et ou la garnit de paille. L'étal-major de notre escorte se plaça dans la principale pièce qui n'étoit séparée de la nôtre que par un mince colombage. La nuit lut gaie pour ces Messieurs : une héroïne qu'ils avoient recrutée à Orléans, en fit les principaux frais: leurs plaisirs furent cependant troublés vers les minuit: une alerte est donnée tout-à-coup ; la cavalerie a ordre de monter à cheval ; les sentinelles sont doublées partout ; Pichegru approche de la croisée pour reconnoître les causes d'un mouvement aussi extraordinaire et aussi inquiétant pour nous; une balle siffle à son oreille: on lui ordonne de se remettre sur sa paille ; et au même instant plusieurs de nous voient placera leur tête un factionnaire armé de deux pistolets, et ce doux oreiller ne les quitte qu'à sept heures du matin. Nous n'avons jamais pu découvrir la véritable cause d'une mesure aussi sévère ; mais il est probable que nous la dûmes à quelque fausse crainte d'enlèvement.


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