Histoire du Dix-huit fructidor : deuxième partie

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DU DIX-HUIT FRUCTIDOR.

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os , nous nous entassons au centre de notre loyer, et nous y attendons, dévorés par l'inquiétude autant que par les mostiques, le huitième jour de notre hasardeuse navigation. Le soleil répond à notre impatience; il se montre enfin, et brille d'un éclat qui nous semble plus pur qu'à l'ordinaire. Barrick, quoiqu'en fort mauvais état, étoit toujours aux aguets; il fut le premier sur pied et marcha à la découverte. A peine avoit-il fait cinq cents pas qu'il s'écria: des hommes!.des hommes! A ce cri nous nous levâmes tous, et nous aperçûmes, à l'extrémité d'un bois qui bordoit la mer, deux hommes. Notre joie ne peut se peindre ; cependant nous ne nous montrâmes point dans la crainte de les effrayer, et de les faire rétrograder : la précaution fut sage; car quoique Barrick se dirigeât seul vers eux, ils le couchèrent en joue, et ce ne fut qu'en se mettant à genou, et en multipliant les signes de détresse qu'il parvint à les rassurer. Ils s'approchèrent de lui, et reconnurent en voyant son état et notre pirogue, qu'il avoit droit à leur pitié : il les amena vers nous; nous les accueillîmes comme des sauveurs, et reconnûmes qu'ils etoient militaires au service de la Hollande. Un d'eux se trouva Français; il nous apprit que nous étions entre Orange et MonteKrick , à environ quatre lieues de l'un et l'autre ; qu'il alloit en ordonnance au fort Orange; que c'étoit par le plus grand des hasards qu'il avoit pris ce chemin ; que nous avions couru risque de rester à jamais sur celte plage infestée de tigres ; et enfin il nous promit de nous reprendre le lendemain pour nous conduire à Monte-Krick, où nous voulions nous rendre.


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