Histoire du Dix-huit fructidor : deuxième partie

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DU DIX-HUIT FRUCTIDOR.

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Un coup-d'œil jeté dans l'intérieur de ia goëlette nous fit connoître qu'elle étoit bien fournie d'armes , et la conversation liée avec notre hôte, nous persuada qu'il quitteroit sans regret la colonie. Nous partîmes travaillés par toutes les idées que devoit nous donner une circonstance aussi séduisante. Nous nous les communiquâmes en chemin, et d'abord nous n'aperçûmes que les avantages qu'elle offroit : il nous paroissoit très-aisé de décider le maître à fuir avec nous , en lui assurant pour récompense première la propriété de la goëlette. Il ne l'étoit pas moins de l'y forcer s i , contre toute vraisemblance, il s'y refusoit. La goëlette pouvoit soutenir un long trajet ; elle étoit bien approvisionnée ; enfin nous trouvions un conducteur plus sûr encore que les Indiens. Arrivés à Sinamary, nous coufiâmes notre bonne fortune à Aubry : il fut séduit comme nous au premier aperçu ; cependant en réfléchissant de nouveau à cette tentative décisive de notre sort, les inconvéniens se présentèrent. Quels étoient ceux de nos compagnons qui voudroient en courir les risques ? quel traitement subiroit ce qui resteroit après nous ? à qui appartenoit la goëlette ? si elle n'étoit pas une propriété du gouvernement , imiterions-nous les brigands qui nous avoient envoyés à Sinamary ? Nous étions dans l'usage de nous réunir tous les soirs sur une pelouse assez agréable, et de nous y promener quelques heures. Nous nous distribuâmes les rôles ; nous désignâmes ceux de nos camarades avec lesquels nous lierions ce soir-là plus particulièrement


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