Histoire du Dix-huit fructidor : deuxième partie

Page 101

DU DIX-HUIT FRUCTIDOR.

351

La frayeur s'empara de l'équipage, et le capitaine se vit forcé de mouiller dans la rade de Blaye. Le lendemain matin il me fit demander : je me rendis à la chambre du Conseil, où en présence des officiers il me dit : Voici un paquet de lettres qui m'a été apporté pour vous, citoyen , je n'ai pas voulu l'ouvrir quoique j ' y sois autorisé , bien persuadé qu'il ne contient rien de répréhensible — J e vais , Monsieur, l'ouvrir devant vous : Grand Dieu ! une lettre de ma femme ! des lettres pour mes compagnons d'infortune ! E t par quel prodige ces lettres vous sont-elles parvenues ? — Deux jeunes gens dont l'un s'est dit votre beau frère, et l'autre, f i s de M . Lafond, les ont apportés à bord. — E t il ne leur a pas été permis de nous voir, peut-être pour la dernière fois!— J e ne le pouvois p a s , et l'officier qui montait le lougre m'en a renouvelé la défense. J e suis aussi dépositaire des effets et de l'argent que vous voyez : les noms de ceux a qui ils appartiennent sont dessus ; mais je ne dois vous remettre le tout qu'au débarquement.— Les lettres, Monsieur, sont les objets qui nous intéressent le plus : gardez le reste puisque vous en avez tordre : donnez - en seulement une reconnaissance. — Rien de plus juste : j e l'avois faite d'avance ; la voici. Le mauvais temps ne nous avoit pas permis de penser à sortir de notre réduit. Mais les vents ayant molli le 25 , nous demandâmes la liberté de prendre un peu l'air sur le pont. Le capitaine consentit à ce que moitié de nous y montât pendant deux heures, et fût remplacée par l'autre moitié pendant le même espace de temps. I1 nous fut défendu de passer le grand mât, et de nous


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.