Histoire du Dix-huit fructidor : Première partie

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DU DIX-HUIT FRUCTIDOR. dont ils s'étoient emparés le 31 mai. Quarante-deux

qu'elle fut conduite au supplice. Au moment d'y monter , le p r ê t r e Girard lui dit : « Voilà le moment de montrer du c o u rage. — D u courage, répondit-elle, il y a si long-temps que j'en fais apprentissage ! croyez qu'il ne me manquera pas aujourd'hui. » » Elle conserva en effet tout le sien pendant le trajet de la Conciergerie à la place de la Révolution, au milieu des cris et des menaces d'une multitude furieuse qui lui répétoit en style ordurier tous les griefs contenus dans l'acte d'accusation. » A midi précis, la voiture arrivoit sur la place de la Révolution ; la Reine fixa quelque temps les arbres des Tuileries, qui lui rappeloient sans doute de cruels souvenirs; elle reçut la dernière bénédiction du prêtre qui l'accompagnoit. » A midi et un quart elle avoit cessé d'exister. » Ainsi finit une Princesse que le chevalier de Boufflers peignit ai bien peu de temps auparavant dans le discours qu'il lui adressa au nom de l'Académie française. « Si j'osois tracer à Votre Majesté, disoit-il, l'image d'une per» sonne vraiment digne des hommages de l'univers , sur qui le » Ciel sembleroit avoir d'avance répandu l'éclat du diadème, q u i » joindroit une dignité plus qu'humaine à une grâce presque » divine, dont l'affabilité conserveroit je ne sais quoi d'impo» sant qui obligeroit à la vénération en permettant la confiance, » et chez qui enfin la délicatesse de son s e x e , en offrant l ' e x » pression des qualités les plus aimables, sembleroit servir de » voile à la force et au courage d'un h é r o s , Votre Majesté nom» meroit l'auguste Marie-Thérèse, et tous les Français nomme» roient son auguste fille. Si je faisois connoître cette ame » égale et généreuse, aussi forte contre ses propres chagrins que » sensible aux peines des autres, avec cette raison en même temps maîtresse d'elle-même , souvent inspirée, jamais d o » minée par les événemens; enfin, si j'essayois de peindre ce » don heureux d'étonner et de gagner les esprits par u n main» tien toujours digne, mais toujours conforme aux circonstances 16


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