Histoire du Dix-huit fructidor : Première partie

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DU S E HUIT FRUCTIDOR

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avoit emprunté douze cent cinquante millions. Les se-

cours donnés à l'Amérique , les flottes à entretenir en avoient consommé la plus grande partie ; l'autre avoit été employée à payer les intérêts des emprunts précédées. Ces intérêts s'étoient élevés à une somme si prodigieuse, qu'il falloit emprunter chaque année un capital considérable non pour les éteindre , mais seulement pour les acquitter. Ils renaissoient l'année s u i vante; le capital emprunté en produisoit de nouveaux. C'étoit la tête de l'hydre qui ne disparoissoit un m o ment que pour se remontrer plus effrayante. Pendant quelque temps M. de Calonne, qui avoit succédé à M. Necker ( i ) , lutta avec courage contre ces difficul-

(I) M. Necker avoit été nommé directeur du trésor royal eu 1776. Pour se populariser, il fît imprimer le compte rendu au R o i , des recettes et dépenses de l'Etat ; et,quelque temps après sa première retraite , il publia son ouvrage sur l'Administration des finances. Il marchoit à grands pas vers la place de principal ministre, lorsque le R o i , se défiant de son ambition, lui fit demander sa démission au mois de mai 1781. Cette disgrâce fut présentée par les nombreux amis qu'il avoit à la cour_, comme une calamité publique. Un des plus puissans adressa au R o i , à cette occasion, le 3 juin, jour de la Pentecôte, en sortant de la messe du Saint-Esprit, le discours suivant ; SIRE, C'est en vain que nous aurions recours aux prestiges de l'éloquence pour attendrir le cœur de Votre Majesté. Quelles plus touchantes prières que les cris d'une douleur universelle et les grincemens de tout un peuple ? La capitale et les provinces retentissent de la nouvelle la plus


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