Histoire du Dix-huit fructidor : Première partie

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HISTOIRE

cions à recueillir les fruits acerbes de celte liberté(I), de cette égalité qui tournèrent tant de têtes. Leur dangereux poison avoit été porté au-delà des mers: les noirs l'avoient reçu avec une avidité féroce; Saint-Domingue , livrée à leur fureur, nous échappoit, et la perle de celle colonie, la plus florissante de l'Amérique, faisoit rétrograder de cent ans notre commerce et notre marine. Mais pouvoit-on acheter trop cher les bienfaits d'une constitution à la tête de laquelle figuroient les droits de l'homme et la souveraineté du peuple ? Ce

n'étoit

cependant

pas

précisément ce que

vouloit M. Necker. Son ambition tendoit à devenir le ministre de la nation plutôt que celui du Roi ; il croyoit apercevoir dans la forme du gouvernement anglais plus que dans tout autre, les garanties de celte espèce d'indépendance : il avoit conçu l'idée de l'établir en France, et l'espoir d'être admis à la chambre haute lui avoit créé beaucoup de partisans. Mais l'autorité royale, dont il avoit brisé lui-même ou laissé briser les principaux ressorts, n'avoit plus la force nécessaire pour recourir à ce remède, le seul peutêtre qui pût cès-lors tirer la monarchie du chaos anarchique dans lequel elle s'enfonçoit chaque jour davan-

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(I) « Fière et sainte liberté! Je ris de ces peuples qui, se laissant ameuter par des ligueurs, osent parler de liberté sans même en avoir l'idée. Le cœur plein des vices des esclaves, ils imaginent que pour être libres, IL suffit d'être des mutins. » ( J. J. ROUSSEAU , Gouvernement de la Pologne. )


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